Par Patrick Rey (chroniqueur exclusif) - Consultant-Délégué Régional du Groupe ITG
Qui sont les solos ? Comment fonctionnent-ils ? Quels sont leurs besoins ? Certaines sociétés de portage salarial ont sérieusement réfléchi à ces questions, en mettant en place des processus et des services dignes de ce nom. C'est ce qui ressort de l'accord professionnel entre trois syndicats de salariés — CFDT, CFTC et CFE-CGC — et un syndicat patronal — le SNEPS (Syndicat National des Entreprises de Portage Salarial).
Qui sont les solos ? Des individus qui ont créé leur activité de façon indépendante. Qui ont opté soit pour un statut d'entreprise (unipersonnelle à responsabilité limitée) ou individuelle (statut libéral), soit pour un statut de salarié (via le portage salarial).
Comment fonctionnent les solos ? Souples, agiles, nomades, ils ont recours au télétravail, pour préparer leurs rendez-vous clients, leurs propositions, leurs missions, leurs interventions, puis pour rédiger leurs rapports, diagnostics, évaluations, etc. Connectés, depuis chez eux, chez leurs clients, en déplacement, les solos doivent maîtriser l'écrit, l'oral, les outils de communication et de traitement de l'information.
Quels sont leurs besoins ? Flexibilité ? Sécurité ? Flexibilité, pour répondre rapidement à une demande client et de manière bien adaptée et personnalisée. Sécurité, pour avoir des garanties, des textes applicables, des moyens de conforter ou de développer leur professionnalisme.
La flexisécurité, qui combine flexibilité et sécurité, est devenue à la mode, après que divers politiques aient fait le voyage au Danemark, où elle semble avoir été mise en place au niveau macro-économique. L'analyse est la suivante : de plus en plus et de plus en plus vite, des emplois sont détruits ; au même moment, tout aussi vite, de nouveaux emplois émergent ; les salariés, mal préparés par des entreprises qui n'ont rien vu venir ou qui n'ont pas réagi à temps, se retrouvent dans des situations précaires ; alors, au lieu de se concentrer sur la défense inefficace et vaine des emplois qui disparaissent, pourquoi ne pas chercher à préparer les salariés à de nouveaux métiers ?
Jusqu'à présent, peu de pays non scandinaves voulaient de cette flexisécurité : les anglo-saxons, opposés au volet "sécurité", les français, opposés au volet "flexibilité". Les Pays-Bas ont voté une loi sur ce sujet en 1999 et la Communauté Européenne a progressivement mis en forme ce concept, nécessaire pour faire face aux enjeux de la croissance et de l'emploi, tout en prenant en compte le profond attachement des pays européens pour la cohésion sociale et la solidarité (voir l'intéressant article de fond de l'Union Européenne intitulé "Flexicurité – La flexibilité par la sécurité").
Bernard Gazier* (dans "L'introuvable sécurité de l'emploi", Flammarion) plaidait pour le "noyau dur d'un modèle social renouvelé, une version collective de la flexisécurité" où les garanties seraient fondées sur le dialogue social. L'idée étant que solidarité et coordination rendent la mobilité acceptable par tous.
C'est précisément ce qu'ont réalisé les partenaires sociaux, avec cet accord qui encadre la pratique du portage salarial dans les entreprises relevant de la convention collective nationale (CCN) SYNTEC-CICF. Les solos vont pouvoir profiter des dispositifs de l'accord, s'ils sont des professionnels de l'informatique, de l'ingénierie ou du conseil et s'ils sont dans une une société du SNEPS.
Quels sont les principaux éléments de l'accord** ? Le contrat de travail est un CDI, par défaut, sauf exceptions liées par exemple à la durée de la mission ; les salariés ont tous le statut cadre ; les dispositifs du télétravail s'appliquent, ainsi que tous ceux de la CCN, par exemple la formation professionnelle, le droit individuel à la formation ; la propriété intellectuelle et la clientèle appartiennent aux salariés portés ; pas de clause d'exclusivité, ni de non-concurrence, etc.
Pas étonnant que les solos choisissent de plus en plus le portage salarial : davantage de sécurité que l'indépendant, davantage de flexibilité que l'Eurl, un meilleur rapport qualité/prix en termes de coût et de temps gagné sur la gestion administrative.
(*) Economiste du travail et spécialiste des politiques de l'emploi, Bernard Gazier est aussi professeur à l'université Paris I.
(**) Pour télécharger l'accord complet.
Il ne serait pas inutile de parler des coopératives d'activités et du statut d'entrpreneur salarié.
http://www.cooperer.coop/
Rédigé par : FAILLY | 28 décembre 2007 à 00:21