Par Eric Dupin - Concepteur web indépendant
Je suis confronté régulièrement à cette question, à laquelle j'éprouve quelques difficultés à apporter un début de réponse.
De quoi parlons-nous exactement ?
Mettons que je sois chez un client qui souhaite mettre en place une nouvelle version de son site web. Qu'il soit déjà client (si nous avons réalisé la version actuelle) ou pas importe peu.
Le client expose sa vision de la nouvelle version du site, et il s'avère qu'il va falloir repartir d'une feuille blanche - ce que je préfère de loin à toute autre forme de compromis - tout en conservant le contenu actuel. Le client s'interroge également sur le positionnement très moyen dans les moteurs de recherche et sur la fréquentation insuffisante de son site.
Bref, y a du taff et on va pas se plaindre.
Mais il faut que ce travail rapporte, qu'il soit rentable et profitable pour les deux parties.
Que proposons-nous ?
Si je veux faire un travail sérieux et professionnel, avant même de proposer un devis, il faut à minima (et à fortiori si le site a été réalisé par une autre agence) que je regarde le site actuel, si possible en détail, y compris le code-source, et même le cas échéant que je prenne contact avec le prestataire actuel (hum...) pour tenter d'obtenir quelques renseignements complémentaires.
Il faut également que je regarde ce qui cloche dans le référencement, et accessoirement que j'observe ce que font les concurrents, sur le web et dans le même secteur, leur positionnement, leur visibilité, le contenu valorisé dans leur site, etc...
Un travail préalable sur lequel je vais m'appuyer pour monter une proposition cohérente et intéressante.
Un travail d'audit, en fait.
Bien sûr, emportés par l'élan et la perspective toujours alléchante de traiter une nouvelle affaire, combinés à la passion qui nous anime tous normalement pour ce job, nous voilà partis dans l'analyse du bazar à peine rentrés au bureau (à bride abattue et la bave aux lèvres), à étudier compulsivement le site sous toutes ses coutures, les mots-clés dans le code, les...
STOP !
Première erreur : quand commence notre prestation, disais-je plus haut ? Et bien normalement elle a déjà commencé. Et cette prestation, c'est notre métier, notre gagne-pain. Or en commençant de la sorte, on dévalorise déjà notre futur travail en foulant au pied une potentielle source de revenus. Et accessoirement, de crédibilité.
Dans un monde idéal.
Sauf que...
Dans la vraie vie avec les vrais clients, cela ne se passe pas tout à fait comme ça. Qui n'a pas passé des heures à peaufiner une proposition et des maquettes en réponse à un appel d'offre sans aucune garantie d'être sélectionné ? Qui n'a pas déjà commencé à développer ou installer un bout d'application juste pour s'assure que ce qu'on va proposer au client tiendra la route, avant même d'avoir fait la première ligne de devis et alors qu'on sait être en concurrence avec trois autres perstataires ?
Hein ? Qui ? je vous le donne Emile : personne.
Ok, mais alors qu'est-ce qu'on fait maintenant ?
Justement : je ne sais pas.
La question est : est-il possible de facturer le temps de réflexion préalable à la conclusion d'une affaire ?
Autrement dit, est-il possible de faire comprendre à un (potentiel futur) client que pour pouvoir lui faire une offre sérieuse et argumentée, nous allons devoir procéder à un audit détaillé de son site, de son environnement concurrentiel, de la pertinence des mots-clés à utiliser, de la stratégie webmarketing à mettre en place dans le contexte qui est le sien, que tout cela représente plusieurs heures, voire dizaines d'heures de travail de collecte et d'analyse d'information, puis de reporting si possible sous une forme attractive et compréhensible.
Où comment le webdesigner se mue en consultant, sans avoir pour autant la légitimité de facturer ce travail à sa juste valeur.
J'ai eu récemment le cas, avec un important organisme public avec lequel je suis en négociations avancées : étude du site actuel (300 pages), étude du positionnement, etc... J'étais lors du dernier entretien avec eux sous un feu nourri de questions informelles et anarchiques qui venaient sans qu'aucune réflexion n'ait été apparemment menée préalablement.
Pour la première fois, j'ai tout arrêté (poliment) et j'ai répondu en substance : Messieurs, je suis désolé mais je ne peux pas vous répondre comme ça, ce que vous me demandez là demande une véritable mission d'audit, ce que nous ferons avec plaisir, mais je dois vous proposer un budget pour cela.
J'ai été étonné de voir que mes interlocuteurs ne furent pas choqués par cette sortie, et semblaient en admettre même la légitimité.
Mais il y a loin de la coupe aux lèvres : je suis toujours en contact avec cet organisme, mais d'audit il n'est plus du tout question.
Juste faire le site ;-)
Frustrant, non ?
Et vous, quel est votre retour d'expérience sur la question ?
G connu une situation identique pendant 15 ans passés dans le secteur de la formation intra-entreprise et du e-learning : des processus complexes à organiser et des clients peu habiles à identifier leurs vrais besoins.
C'est effectivement le lot commun de nombreux prestataires intellectuels aux entreprises et organismes publics (où la situation me paraît pire encore.
Conseils et formations divers, publicité, systèmes informatiques, solutions réseaux, immobilier d'entreprise, relations bancaires ; voilà autant de métiers où la phase technicocommerciale est lourde alors que le résultat commercial reste aléatoire. cela me paraît essentiellement lié à la nature des prestations et leur niveau de complexité.
En vrac, quelques constatatons personnelles pour solutionner le problème :
1/ce temps consacré à l'étude et la proposition commerciale est en fait facturé par la suite ; c'est un cout caché du prestataire de service qu'il doit intégrer dans ses prix s'il veut rester profitable. Si l'entreprise veut survivre, elle doit s'arranger pour faire supporter à ses clients les investissements engagés sur des affaires non conclues.
2/la phase technicocommerciale est une élément du BFR. On peut dire que le cycle d'exploitation intègre des couts avant que le contrat soit conclu ; ces dépenses engagées en vue d'obtenir le marché doivent être financées sur la structure. Les prestataires de service ont donc intérêt à posséder un fonds de roulement solide.
3/la répartition interne des ressources/hommes doit maintenir sous contrainte le temps consacré à la phase technico commerciale de chaque marché. On doit encadrer l'équipe technico commerciale et piloter le temps de travail des collaborateurs.
Rédigé par : lsm | 24 août 2006 à 00:26
Bonjour,
Je suis assez d'accord avec cette difficulté, que j'essaye de contourner le plus souvent possible. En fait, il y a deux cas de figure :
- soit c'est un appel d'offres, et là, pas le choix, il faut donner beaucoup de valeur ajoutée non valorisée pour séduire
- soit c'est un contact direct, et là, on limite les frais en essayant simplement de proposer un plan de travail, en montrant l'importance de réaliser une première mission "d'audit" ou de réflexion.
Notre péché de jeunesse chez Nauconsultants a été de tout donner avant la signature du devis. Et nous n'avons pas vendu beaucoup de ce que nous avons produit dans cette phase. Nous faisons donc maintenant beaucoup plus court et "plan de travail", et donnant quelques pistes, quelques constats et pas plus.
Parfois cela fonctionne.
Question : quel rapport entre le titre du biellet et son contenu ?
Bonne journée,
Rédigé par : Stéphane Nau | 24 août 2006 à 10:07
Vendre du temps de cerveau disponible ?
Mais tout le monde est d'accord avec cela !
Allez demander au services marketing de TF1 ?
Ils vous le diront trés clairement : "oui c'est notre job ! C'est affreux mais c'est comme cela !"
Et dire qu'ils sortent tous des mêmes écoles que vous !
Rédigé par : Toto | 28 août 2006 à 17:18
Bien entendu que ce "temps de cerveau" est l'un point important dans la notion même de "travail" dans notre économie libérale... ou de celle de la séparation entre le "temps de travail" et le "temps libre"... ce qui ne veut d'ailleurs pas dire que l'on ne pense pas en dehors du travail... :-)
Pour en revenir à ce temps de cerveau : il faut bien définir le plan de travail et le cahier des charges afin que tout soit clair en amont : l'étude préalable reste néanmoins nécessaire à tout dossier... généralement on la compte LÉGITIMEMENT dans le cahier des charges du travail à effectuer en qualité de "MÉTHODE INCOMPRESSIBLE" sous la forme d'un audit effectivement payé (reste à définir la forme du paiement qui est généralement inclue dans le travail global et "non séparée")... il y a une forme de consulting dans tout travail à effectuer, puisque avant de "faire" un travail on doit "y penser", et le mieux possible... CQFD
Rédigé par : Marc MALDINEZ | 22 mai 2008 à 19:35
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Rédigé par : Fredricka Fleniken | 04 février 2013 à 03:58
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Rédigé par : Pasty Behner | 04 février 2013 à 08:07