Par Vincent Rivalle (chroniqueur exclusif) – KDZ’ID (Accompagnement au développement de TPE et PME) – TRAD ONLINE (Associé – Société de traduction)
En discutant avec de nombreux chefs d’entreprise, il semble que beaucoup d’entre eux aient la tête pleine de nouvelles idées (nouveaux produits, nouvelles activités, nouvelles manières d’adresser leurs marchés, etc.), au point qu’il est parfois difficile de commencer des réunions, ateliers ou petits-déjeuners en commun sur des sujets très opérationnels et courts termes. Pourtant, la très grande majorité d’entre eux se raccroche au trop rapidement utilisé « la tête dans les étoiles et les pieds dans la glaise ». Ils ne sont pas les seuls dans leurs entreprises et leur écosystème à avoir des idées, leurs collaborateurs, leurs sous-traitants, leurs clients…les sources d’idées sont nombreuses.
Que faire de toutes ces idées, intuitions, nouvelles pistes ? N’est-il pas dommage de les oublier, de les mettre de côté dans le meilleur des cas, de les enterrer dans le pire…et au final, d’avoir l’impression de s’autocensurer et de brider sa créativité et celle de ses collaborateurs.
Avoir une idée n’est que la première étape…on peut souvent lire et entendre ça et là que l’étape cruciale est la mise en application, le passage à l’opérationnel. Une même idée innovante germe dans beaucoup d’esprits au même moment…c’est la personne qui sait comment, avec qui et quand la mettre en application qui « remporte la bataille ».
Je me pose la question : que nous manque-t-il, que manque-t-il aux responsables d’entreprises aujourd’hui pour expérimenter de nouvelles voies ?
Une première réponse évidente : les ressources… Toutes nos entreprises sont aujourd’hui dimensionnées au minimum en ce qui concerne les ressources. Comment faire aujourd’hui pour détourner ces personnes de toutes les taches nécessaires à la bonne marche de l’activité ? C’est un vrai sujet.
Une deuxième réponse : les compétences nécessaires… Les entreprises regorgent de collaborateurs avec des compétences pointues, qu’elles soient connues ou cachées. Si les compétences manquent…les moyens aujourd’hui permettant de les identifier sont très nombreux (réseaux physiques, réseaux sociaux, partenaires, recommandations, etc.). Cela ne semble pas être le sujet central. Un point important certes, mais gérable.
Il faut aussi noter que les livres de management et la pensée "globale/généraliste" répètent inlassablement… « il faut avoir une stratégie qui priorise et concentre ses actions et ne pas se disperser »…ce n'est pas totalement faux, mais cela renforce par la même cette frustration d’avoir parfois la sensation de passer à côté d’une opportunité.
Alors pourquoi toutes ces idées se perdent ? 3M a souvent été cité pour sa gestion de l’innovation. Les managers devaient permettre (voire même, encourager) aux collaborateurs le souhaitant de prendre du temps « sur leur temps de travail » pour développer de nouvelles idées et mener des expérimentations. Cet espace d’expérimentation en interne est ou était possible au regard de la taille de l’entreprise…Dans les PME ou TPE…cela semble être, dans une très grande majorité des cas, un peu difficile à organiser…
J’ai rencontré D.Guillard de la société Daydream qui, dans son offre, propose une approche bien particulière qui a fait tilt chez moi : Daydream, qui est spécialisé dans un ou deux secteurs technologiques bien précis (les plastiques notamment), mets à disposition une équipe projet dédiée en deux temps :
· En amont, aider ses clients à passer, si je peux résumer ainsi, d’une intuition à une certitude quant à l’existence d’un marché
· En aval, mettre à disposition une force commerciale dédiée qui, en fonction des clients, se charge de tester ce nouveau marché, défricher, et procéder aux premières ventes.
Ensuite, le client décide de ré-internaliser la compétence et le sujet, de continuer avec les équipes de Daydream ou d’abandonner le projet.
Je résume et simplifie : Daydream, sur son secteur bien précis, permet à ses clients de passer du rêve à la réalité (qui peut être rude dans certains cas) et d’avancer avec des faits et non des suppositions. Quand on aborde le thème de l’innovation, les bonnes pratiques suggèrent souvent de « tuer » ou, beaucoup mieux, « de recaler ou reconfigurer » des idées que de les laisser en suspend…Ceci pour des questions de frustrations, d’énergie dépensée, etc.
Tout cela a renforcé mes convictions.
D’autres entreprises prospèrent agréablement en temps normal, mais surtout en période de crise. L’offre proposée est simple : « laissez-nous regarder, fouiller chez vous, soulever la poussière, vider vos fonds de tiroir,…et, en nous appuyant sur notre expertise multisectorielle, nous dénicherons des pépites que vous valoriserons pour vous, ou nous vous les achèterons ». Ces pépites peuvent prendre la forme de brevets dans le cas où un portefeuille de brevets vieillissant ou sous utilisés serait livré à l'analyse de ces acteurs. Il peut s'agir aussi de sous-produits, technologies, savoirs-faires, outils-maisons, processus, réseaux de distribution, sous-traitants maitrisés, etc.
Je pose ici une question : quel avenir pour une entreprise qui aurait pour mission d'aider les entreprises à explorer de nouvelles voies, en les accompagnant sur la création de la nouvelle offre et en prenant en charge le développement de l'activité pendant les premiers temps. Une sorte de spin-off, cadrée par un contrat et des engagements "bétons", et très souples, agrégeant des experts autour d'un noyau dur, garant du processus et détenant les savoirs-faires au cœur de la démarche "de l'offre à la mise sur le marché". Je parle de projets tels qu’expérimenter un nouveau service, identifier un partenaire et structurer une nouvelle offre, …
Le gain pour l'entreprise : capitaliser sur ses actifs sans prendre de risques forts d'investissements lourds, sans disperser ses troupes (allez faire vendre à un commercial un nouveau produit pour lequel il doit évangéliser ses prospects…alors que "ses" produits traditionnels se vendent déjà très bien et sans effort supplémentaire…pas si simple, non ?).
Pour finir, non une question, mais une proposition cette fois. Créer un nouveau dispositif – oui, encore un…mais s'il est bien outillé, simple et connu…je me porte (presque) garant de son succès et de sa rentabilité pour la TPE ou la PME – un dispositif sur le modèle du Cifre (axés sur les thèses), avec une dose du dispositif VIE mais sans avoir pour but un projet de recherche s'inscrivant dans un parcours de doctorant, ni avoir comme but le soutien à l'internationalisation, mais avec un objectif clair de "défricheur de nouveaux marchés ou offres, d'intrapreneur permettant de mener de tels projets pour la PME en mal de nouveaux territoires. Financé par l'état car s'inscrivant dans cette volonté de faire se développer nos trop nombreuses petites entreprises pour passer le cap fatidique en terme de taille et pourquoi pas, mettre en place un système de rémunération du dispositif (permettant de financer à son tour des nouveaux "intrapreneurs" en fonction de la réussite du projet ?
En allant un cran plus loin, on pourrait même parler d’une avance remboursable en cas de succès du projet, sauf si embauche en CDI de l’intrapreneur.
On dit souvent qu’en France, on a des idées mais que ce sont les autres qui réussissent à les transformer…. Faisons en sorte que cela change.