Par Gaëtan Baudry (contributeur exclusif) – Legal’Easy : pacte-associes.fr et my-business-plan.fr
« Avez-vous fait une étude de marché pour votre business plan? Qu’en ressort-il » Voilà la phrase qu’entend un entrepreneur 50 fois par jour quand il postule à un concours, cherche à obtenir un prêt (bon courage !) ou à lever des fonds. Pourtant, à y regarder de plus près, la majorité des entrepreneurs va avoir du mal à contracter un prêt. La majorité ne parviendra pas à lever des fonds en moins d’un an et il n’y a qu’un seul vainqueur d’un concours de business plan. Autrement dit, on peut en regardant les business plan des « perdants » et notamment la partie étude de marché comprendre tout ce qu’il faut éviter de mettre dans un business plan. J’ai moi-même rédigé et analysé de nombreux business plans. J’ai réalisé de nombreuses études de marché, notamment quand je travaillais en junior entreprise et j’ai pu voir et même faire de nombreuses erreurs! Comme le dit l’adage, « le fort n’est pas celui qui ne tombe jamais mais celui qui tombe, se relève et continue de marcher ». Alors, si vous cherchez une stratégie pour rater l’étude de marché de votre business plan, suivez les conseils suivants :
Utiliser uniquement des sources d’autorité
Si Mercer Oliver Wyman le dit, c’est que c’est vrai. Beaucoup d’entrepreneurs cherchent à crédibiliser leur étude de marché en citant des sources d’autorité : L’INSEE , tel think tank qui a réalisé une étude de marché précise sur son secteur ou l’IPSOS. Un entrepreneur doit-il citer des sources de ce type ? Oui, cela peut rassurer notamment son banquier. MAIS, il faut garder en tête que ces études ne sont pas adaptées au marché que l’entrepreneur vise. Ce sont de grandes études macro économiques, utiles pour comprendre une dynamique de marché. Mais complètement inutiles pour essayer de voir si un marché existe pour l’entrepreneur (et si des clients solvables sont prêts à payer pour la solution proposée par l’entrepreneur). Comme me le disait assez justement un professeur d’entrepreneuriat, il y a toujours deux interprétations possibles dans une étude macro économique.
- Etude A «En Afrique, 85% de la population ne porte pas de chaussure. Le marché va donc connaître une forte croissance. Le marché est à prendre ! »
- Etude B « En Afrique, 85% de la population ne porte pas de chaussure, il n’y a pas de marché ». On peut faire dire ce que l’on veut à des chiffres macro économique. Méfiez –vous donc ces études et gardez en tête qu’au lancement d’une entreprise, ce qui compte, c’est le micro économique.
Google, il n’y a que cela de vrai
Ha la fameuse étude Google ! « J’ai fait des recherches sur internet. » Il ne faut pas se trouver des excuses pour rester derrière son ordinateur ! L’étude de marché doit vous pousser à rencontrer des clients PHYSIQUES ! Même si vous lancez un site internet, vous ne trouverez jamais autant d’informations qu’en rencontrant de visu des clients potentiels. Internet peut vous donner beaucoup d’informations et les statistiques sont très précises (vive Google Analytics ! ) Mais il faut vous forcer à rencontrer de visu vos prospects. Rester derrière son ordinateur, même pour une entreprise internet, est le meilleur moyen de s’éloigner de son marché. Profitez de l’étude de marché pour rencontrer vos clients ! Une des questions que je pose toujours à un entrepreneur est « Combien de rendez-vous client avez-vous fait ? » Une autre : pouvez-vous me décrire précisément vos clients ? Leurs habitudes ? Leur processus décisionnel ? Leurs hobbies ?
Le comparable étranger
« Cela marche aux Etats-Unis. Donc cela montre que des gens sont prêts à payer. Cela n’existe pas en France, nous serons les premiers à lancer ce projet. « Avoir des comparables étrangers est une excellente chose mais n’oubliez jamais que deux marchés, même en temps de globalisation, ne sont jamais 100% identiques. Votre étude de marché devra démontrer les spécificités du marché français. Comment comptez-vous adapter le concept américain à ce marché. Les exemples de projets « importés » ayant échoué sont légion ! Même Burger King a dû partir de France avant de revenir récemment !
85% des gens sont prêts à devenir client de notre solution !
« 85% des personnes interrogées se sont dites intéressées par notre solution et prête à l’acheter. »
Quand on pose la question à des personnes dans la rue, TOUT le monde est intéressé par votre projet. Tout le monde est prêt à devenir client. Quand il s’agit de sortir le chéquier, la réponse est différente ! Il n’y a pas de meilleure étude de marché que la vente en réelle. Je me souviens de ce projet qui souhaitait créer une plateforme de vente de produit bio sur les campus. Pour démontrer l’existence du marché, ils ont administré des questionnaires pendant une semaine sur les campus. Résultat : 87% de personnes favorables au projet. Mais il aurait mieux valu venir sur les campus avec des produit bio (plutôt que des questionnaires papiers) et tenter de les vendre. Les feedbacks, retours des clients et des personnes n’achetant pas ces produits auraient eu une valeur bien plus grande ! Je préfère un entrepreneur me disant que seule une personne sur 100 achète son produit en réel plutôt que 85% de personnes favorables sur un questionnaire.
Faire une étude de marché qui coute plus cher que de lancer le projet
L’étude de marché, c’est bien, le concret, c’est mieux. Si pour lancer votre projet, vous avez besoin d’un million d’euros. Vous aurez en effet besoin d’une étude de marché solide pour convaincre vos financeurs. Si pour lancer votre projet, vous devrez investir 5000€ (comme 90% des projets) dans ce cas, passez vous de l’étude de marché (ou faites en une minimaliste) et lancez rapidement un prototype, moche, raté mais qui vous procurera des feedbacks ayant une valeur inestimable.
Si elle peut être un outil extrêmement précieux dans l’élaboration de votre business plan, l’étude de marché est souvent coûteuse et prends beaucoup de temps. Aussi, c’est à vous de juger s’il est nécessaire ou non d’investir. Si vous choisissez de réaliser une étude de marché, insistez sur le micro économique. Rien de tel que le terrain pour appréhender un marché. Mais si vous estimez qu’elle ne s’impose pas, rien ne vous empêche de lancer votre projet pour sonder la réactivité du marché !