Créer une entreprise aux USA : ne pas s’encombrer de ses préjugés

Sylvain PerretPar Sylvain Perret (contributeur exclusif)Mon Oncle d’Amérique

Lors de la création d’une entreprise à l’étranger, pour l’entrepreneur qui en avait déjà créé une en France, l’un des dangers, paradoxalement, c’est son expérience.
En effet, l’entrepreneur émigré a pratiqué déjà un certain nombre des étapes et s’y présente, inconsciemment, avec des préjugés.
 
Je vais prendre un exemple qui illustre ce propos : le bail commercial. Pour l’entrepreneur qui souhaite ouvrir un commerce aux États-Unis, la première étape sera de trouver un local. Pour cela, il fera ses recherches sur le web (le plus connu : Loopnet : http://www.loopnet.com/), acquerra le vocabulaire, se fera au système en square feet au lieu des mètres carrés (en gros : diviser par 10)… et trouvera son local.
 
Il aura peut être fait le choix de négocier en direct avec le landlord (propriétaire) ou via un brocker (agent immobilier). Par contre, souvent, sa pensée restera articulée par son expérience en la matière : le fameux bail 3-6-9 !
 
Or, rien n’est plus différent d’un bail commercial français qu’un lease américain !
 
Premier point, en France, la loi protège clairement le locataire. Aux USA, la loi est hyper favorable au propriétaire. La loi encadre tout en France… Aux USA, c’est le contrat qui compte. Peu de choses sont réglées dans la loi, on laisse aux parties la capacité à négocier un contrat dans lequel presque tout est possible.
 
Deuxième point, quelle durée choisir ? « Je vais prendre assez court au cas ou ça ne marche pas et si ça marche, de toute façon, on prorogera ». Eh bien, ce n’est pas si simple. En effet, le droit de suite n’existe pas aux USA. Si le landlord décide de vous dire « Au revoir et merci » au bout de vos 5 ans à développer votre affaire et de donner en location le local à une grande chaine nationale qui louchait sur votre emplacement, rien ne l’en empêche. C’est pour cela qu’avoir une clause prévoyant un éventuel renouvellement et ses conditions vous protège.
 
Une anecdote pour en finir avec le bail. Lors de ma première location de magasin en Floride, j’ai négocié avec un brocker pour me représenter et je l’ai bien laissé parler. Quand nous en sommes arrivés à la question des travaux dans le local, j’étais surpris des détails que nous abordions. En effet, j’avais donné une estimation globale des travaux qui allaient me couter quand même pas mal d’argent. Jusqu’à ce que je découvre que le brocker était en train de négocier une participation financière du landlord aux travaux. Cela ne me serait pas venu à l’idée de l’évoquer ! Je suis ressorti de la négociation avec 3 mois gratuits, 3 mois à 1/2 loyers, une participation à hauteur de 12$ par square feet. Inimaginable pour moi !
 
Aujourd’hui, lorsque dans mes différentes missions j’aide un entrepreneur français à s’établir aux États-Unis, je lui conseille d’abord de repartir à neuf au niveau des idées et ne rien considérer comme acquis. On peut avoir de bonnes surprises, mais aussi de très mauvaises. Ensuite, je l’incite à s’entourer correctement ne serait ce que pour comprendre la portée des contrats qu’il signe. J’ai entendu plusieurs fois, trop souvent à mon gout, cette phrase « Too bad, so sad » qu’on pourrait traduire par un ironique « C’est vraiment trop dommage ».
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