Par Loïc Le Meur, entrepreneur et bloggeur français
Je pense réellement que l’idée n’a pas la valeur que l’on veut bien lui accorder quand on décide de créer une entreprise.
Beaucoup d’entre nous attendent d’avoir l’idée du siècle avant de se lancer et je crois que c’est une erreur. D’ailleurs je montre souvent dans ma présentation des dizaines d’idées de création qui ne demandent qu’à être lancées, pour illustrer le fait qu’une idée n’a aucune valeur tant qu’elle n’est pas réellement "exécutée".
Certains cachent leurs idées de création, les protègent comme s’il s’agissait de l’idée du siècle, de peur que l’on leur « vole ».
Au contraire, il est à mon avis très important quand on va se lancer de partager ses idées avec son entourage. Les avis extérieurs sont très constructifs, vous permettent de mettre en avant des points auxquels vous n'auriez pas pensé. Il faut aller au-delà des critiques pour en tirer quelque chose de constructif.
Lorsque j’ai une idée de création d’entreprise, la meilleure technique je pense est de la partager avec ses amis et son réseau. Si elle est mauvaise, il y a beaucoup de chance pour que vous le sachiez rapidement.
Ma vision des choses est que la création d’une entreprise permet de « combler » l’espace vide. Il ne faut pas la bonne idée mais bien identifier un besoin dans un domaine donné. Combien de fois, vous faites vous la réflexion : « franchement on doit pouvoir faire mieux » ou « tiens voilà une idée à lancer » dans les services ou produits que vous croisez tous les jours, en tant que client ou qu’utilisateur. Combien de fois regrettez- vous qu’une entreprise ne soit pas à même de vous fournir tel ou tel service, tel ou tel produit. C’est ce que j’entends par « combler l’espace vide ». Évaluez la demande pour cet « espace vide » et vous tenez votre idée. Si votre idée répond à cette demande, il y a une bonne probabilité pour que vous trouviez aussi vos premiers clients, si importants.
Quand j’ai commencé ma première société B2L en 1996, une agence web, il n’y en avait que quelques unes en France. Je me suis lancé avec un prêt étudiant de 10 000 euros et un client, Automobiles Peugeot. Dans le cadre des mes études, j’avais fait une mission pour eux, le sujet était « comment améliorer la communication externe de trois concessionnaires Peugeot parisiens. En 1996, c’était évidemment assez tôt, mais je leur ai recommandé de lancer le premier sites de prospection sur Internet pour la vente de véhicules d’occasion. A l’issue de l’étude, Paul Sevin, alors Responsable des ventes France chez Automobiles Peugeot, m’a donné ma chance : « j’aime cette idée, il faut lancer ce site. J’ai donc crée B2L avec un premier client prestigieux, sans avoir aucune idée du développement que nous allions avoir par la suite, j’étais juste persuadé que cette idée apporterait de la valeur pour Automobiles Peugeot.
Et, dans ce projet l’exécution fût clef. Il fallait impérativement que j’honore la confiance que cette personne m’accordait. Nous sommes allés au delà de toutes les attentes en lançant Occasionsdulion.com, premier site automobile « marchand » (de prospection évidemment, nous n’allions pas vendre des automobiles avec un règlement par carte bancaire !) en France. Sur la base de cette référence, et de la satisfaction de Peugeot nous avons gagné des dizaines d’appels d’offre face à des concurrents de plus en plus nombreux et décroché des comptes prestigieux: Chanel, 20th Century Fox, Unilever, Mars…B2L doublait de taille tous les ans (équipe et revenus) et était profitable sans aucun financement extérieur puisqu’au début l’ensemble des profits étaient bien entendu réinvestits dans la croissance de l’entreprise.
L’idée était peu importante, je créais un besoin en faisant découvrir l’Internet à de nombreuses grandes entreprises et je pariais que la demande allait suivre. Les premières références étaient très importantes puisque c’est grâce à ces clients satisfaits que nous avons pu en gagner d’autres.
À l’heure actuelle j’ai en tête une bonne dizaine d’idées de création d’entreprise, mais je me consacre pleinement et entièrement qu’à un seul projet, le lancement de Ublog et des produits de Six Apart en Europe. Il est presque impossible et il est dangereux de vouloir lancer plusieurs idées à la fois, il faut concentrer toutes ses forces sur une seule idée et réaliser la meilleure exécution possible, rendre ses clients heureux autant que possible avec les moyens de l'entreprise.