Par Patrick Rey (chroniqueur exclusif) - Consultant-Délégué ITG, premier groupe de conseil en portage salarial.
Les séparations traditionnelles entre emploi et création n’ont jamais été aussi ténues. Depuis la crise économique de 2008 puis le lancement du régime de l’auto-entreprise en 2009, diverses populations ont été tentées par la création, au moins de leur propre emploi. Le travail “dans tous ses états” se développe, avec également la montée en puissance des autres formes d’emploi ou de création, telles que le portage salarial, les couveuses ou les coopératives.
Chacun a compris que cette crise économique de 2008, conséquence du krach financier de l’automne 2008, après la crise des prêts hypothécaires à risque (subprimes) l’année précédente, n’est pas une crise mais une transformation profonde engagée bien avant, sans doute en suivant l’éclatement de la bulle Internet. Les différentes majorités élues par les citoyens français n’ont pas su/voulu (encore) agir en profondeur pour inverser les mécanismes négatifs qui nous enfoncent toujours plus.
Quant au régime de l’auto-entreprise en 2009, qui sera unifié au 1er janvier 2015 avec les autres formes d’entreprises individuelles sous statut de micro-entreprise, il a attiré plusieurs catégories de personnes : celles avec une vraie envie, celles privées d’emploi parce que trop jeunes ou trop vieilles pour y accéder facilement, ainsi que des retraités ou encore des personnes en emploi ayant besoin de compléter leurs revenus ou envie de tester quelque chose de nouveau.
Régulièrement, des enquêtes montrent que les français ont de plus en plus envie d’entreprendre en général. Les enquêtes ciblées cadres, comme celles de l’Apec, montrent une envie de bouger pour développer de l’autonomie ou par insatisfaction de la situation actuelle ou encore par anticipation d’une perte d’emploi. La récente enquête réalisée pour le site Missioneo.com* montre que même les demandeurs d’emploi sont de plus en plus nombreux à être attirés par le travail en indépendant ou par mission.
De plus en plus de demandeurs d'emploi ont déjà travaillé à leur compte et plus encore envisagent le travail par mission, comme une solution particulièrement utile au retour à l’emploi. Même si la première difficulté quand on veut travailler pour soi consiste à trouver des clients, les personnes considèrent qu'on est plus heureux à travailler en indépendant qu'en emploi classique, tout en comprenant bien qu'on travaille plus lorsqu'on est à son compte.
Tout ceci confirme qu’emploi peut rimer ou pas avec création. De même, création ne signifie pas forcément emploi au départ, puisque ces dernières années la moitié des créateurs sont des auto-entrepreneurs et que la moitié de ces micro-entreprises ne déclarent pas de chiffre d’affaires, l’autre moitié étant TNS.
Le travail est donc de plus en plus multiforme. Il sera intéressant de suivre dans quelques jours les conclusions des débats organisés par la Fondation ITG, à l’occasion du second colloque** sur le thème “Autonomie, mobilités, transitions : comment repenser le travail ?”. Le travail “dans tous ses états” se développe par exemple avec le travail à distance, le travail collaboratif, … au final des frontières de plus en plus gommées entre les différentes formes d’emploi ou de statuts professionnels.
(*) enquête réalisée en septembre 2014 auprès d’un panel de 1416 personnes représentatives de la population française en recherche d’emploi