Faut-il faire une étude de marché pour créer son entreprise ?

Guilhem Bertholet Par Guilhem Bertholet (chroniqueur exclusif) – Incubateur HEC

Si chaque création d’entreprise et chaque entrepreneur est unique, on retrouve quand même chez quasiment tout le monde les mêmes interrogations au moment de se lancer dans le grand bain. Rédaction d’un business-plan, réalisation des prévisions financières, choix des statuts, répartition du capital… autant de sujets propices à s’arracher quelques cheveux…

L’étude de marché est un autre de ces moments pouvant donner le vertige, non seulement car il est difficile pour l’entrepreneur en herbe de savoir par quel bout la commencer, mais aussi car techniquement la tâche semble énorme.

Persuadés de la nécessité d’une étude de marché « dans les règles » (et de trop nombreux livres, cabinets de conseil, coachs ou junior-entreprises s’empressent de renforcer cela), beaucoup de porteurs de projets passent du temps à analyser (et entasser) des chiffres sectoriels, des données et analyses globales et à réaliser des questionnaires « quantitatifs ». Certains l’externalisent même à d’autres, qui revendiquent que « c’est un métier ».

Dans les deux cas, on fait fausse route, et l’entrepreneur ne fait que mettre une distance dangereuse entre lui et la réalité de son marché. Les chiffres obtenus ne sont, de toute manière, jamais vrais, et le pire risque est que le créateur commence à les croire…

En réalité, une étude de marché n’est pas très compliquée, et n’est, formellement, même pas un passage obligé. Au moment de générer du chiffre d’affaires, les camemberts et les pourcentages n’ont qu’un intérêt bien mince. Ce qui est primordial, en revanche, c’est de comprendre ses clients, et de déceler si l’opportunité de marché existe bien. On se fout un peu de savoir que le marché mondial grandira de 8% par an jusqu’en 2017.

Rien de tel donc qu’un contact direct avec ses prospects, pour comprendre leurs enjeux, leurs attentes, et rechercher tel le Graal ce dont ils ont vraiment besoin et quels sont les problèmes que l’on va pouvoir résoudre pour eux. Ce n’est qu’en ayant une connaissance intime de ces éléments et de ces personnes que l’on parviendra à mettre en musique un plan d’action, un plan marketing, un plan commercial.

L’entrepreneur est, dans la phase d’étude de marché, un enquêteur qui cherche à résoudre son enquête. Il veut comprendre qui sont les acteurs de cette grande cour de récré dans laquelle il veut évoluer, et quels sont leurs intérêts respectifs. Il pose, et se pose, sans cesse des questions : quelle saisonnalité ? quel cycle de décision ? sur quels critères s’effectuent les choix ? qui sont les concurrents ? quels sont les prix déjà pratiqués ? qui peut faciliter l’accès aux prospects ? pourquoi telle ou telle offre n’existe pas ? …

Si l’on oublie l’armada du « marketing quantitatif », donc, l’entrepreneur n’est tout de même pas en reste. Au contraire, même, sa boîte à outils regorge de moyens de cerner la vérité. Très vite donc, il va pouvoir par exemple organiser des discussions de groupe autour des besoins de sa cible, espionner ses concurrents pour comprendre pourquoi ils agissent comme ils le font et comment ils parlent à leurs clients, faire des mini-tests pour valider une offre avant qu’elle soit lancée, ou encore intégrer dans ses démarches de mise au point du produit ou du service des utilisateurs.

Étudier un marché, c’est donc bien chercher à le comprendre, constamment, pour s’y adapter. Ce n’est pas une simple démarche un peu barbante, que l’on remplit comme une tâche obligatoire. Et ce n’est surtout pas un beau rapport sur papier glacé que l’on délègue à quelqu’un d’autre !