L’art de se donner des coups de pied au cul

Guilhem Bertholet Par Guilhem Bertholet (chroniqueur exclusif) – Incubateur HEC

Depuis le temps que je croise des entrepreneurs, je me suis rendu compte d’une chose : ceux qui avancent le plus vite sont aussi ceux aiment « se faire mal ». En tout cas, j’en connais peu qui ont réussi à monter une belle entreprise sans passer par des phases assez dures, de doute, de labeur intense, de remise en question, et de travaux presqu’un peu forcés.

Qu’on ne se méprenne : mon propos ici n’est pas de dire que c’est affreux de créer sa boîte et qu’il faut y passer 110 heures par semaine (quoi que, ça peut en passer par là). Non, j’ai juste en tête des périodes où l’on n’a pas envie, et où l’on doit se forcer pour y aller.

J’appelle cela « se donner des coups de pied au cul », un peu vulgairement je vous l’accorde. Ceci dit, la phrase veut bien dire ce qu’elle veut dire ce qu’elle veut dire :

– Se donner des coups de pied au cul, ça fait avancer, c’est certain. C’est d’ailleurs même la principale raison pour laquelle on puisse se forcer ainsi à faire certaines tâches, à se lever le matin, à décrocher son téléphone… Et par moment, il faut bien, pour parvenir à se mettre au boulot, s’auto-motiver mentalement. Voir s’encourager physiquement, et s’engueuler quand on n’y parvient pas.

– Ensuite, il faut avouer qu’on connait tous des phases de moins bien, et c’est bien le propre de la création d’entreprise de vous emmener sur une vraie montagne russe. On peut rapidement se complaire dans ces phases : tout le monde nous en veut, et ce n’est pas quelques heures de travail en moins qui feront la différence, si ?
Hé bien… si ! Quand vous sentez que vous baissez de rythme, il est grand temps de faire appel à votre pied. Direction votre popotin.

– L’entrepreneur est d’ailleurs forcé de se les donner, ces allonges de membre inférieur. Personne ne sera là pour les lui donner ! Et arriver à comprendre ce que vous ne faites pas bien vous fera progresser, et renforcera votre capacité ensuite à donner des coups de pied à d'autres arrières-trains que le vôtre !

– Se frapper le postérieur est également une méthode « punitive ». L’entrepreneur fait constamment des erreurs (sinon, c’est qu’il ne tente pas quelque chose de nouveau, et c’est le début de la fin). Et pour apprendre de ses erreurs, rien de mieux qu’une petite punition. Pourquoi ne pas alors vous infliger un petit châtiment pour bien vous en souvenir ?

– Enfin, je de sais pas si vous avez essayé (levez-vous, et testez), mais s’auto-congratuler les fesses d’un bon 44 (ou quelque soit votre pointure) nécessite un peu de souplesse. En tout cas de souplesse d’esprit, de qualité d’écoute, et de capacité de remise en question. Que des qualités typiques pour un entrepreneur !

Mais alors, si c’est une des qualités de l’entrepreneur, comment arriver à être bon dans cette pratique aussi ? Plusieurs méthodes existent sur le marché, en voici quelques unes éprouvées par l’expérience :

– Recherchez des gens pour vous aider ! Se donner des coups de pied tout seul a ses limites, et finalement, on en vient à apprécier les coups de pied des autres. Entourez-vous donc de personnes qui ont le pied agile et une bonne vision de votre projet !

– Gardez quelques minutes dans la semaine pour faire la liste des choses que vous vous reprochez à vous-même. Cette séance d’autocritique, que vous pouvez filmer ou prendre en note, vous servira plus tard pour, petit à petit, ne plus reproduire les mêmes erreurs.

– Si vous êtes en équipe, c’est même primordial. Faites-vous une réunion (courte) sur le sujet, chacun mettant à plat les griefs qu’il a contre les autres (même les plus petits). Sur le long terme : c’est salvateur !

Tout cela est donc pour la bonne cause : l’entrepreneur a besoin de se faire parfois violence pour avancer, et pour reconnaître qu’il a tord. Et vous, comment faites-vous pour vous remettre dans le sens de la marche lorsque vous faites fausse route où que vous venez à manquer de carburant ?