Le méchant loup et le gentil loup

Martingilles Par Gilles Martin (chroniqueur exclusif) – Président du cabinet de conseil en stratégie et management PMP

Quand chacun se remémore les leaders qui l’ont marqué personnellement, dont il se souvient, à quoi pense-t-il ?

Probablement pas à ses compétences, ses qualités techniques. Ou du moins, ces critères ne font pas la différence.

Ce qui nous marque, c’est ce qui nous inspire.

Et cela vaut toujours quand nous sommes nous-mêmes dans cette position de leader, ou d’apprenti leader. Certains inspirent, donnent envie de les suivre ; et d’autres, malgré leurs efforts, ne provoquent qu’indifférence ou pire, répulsion. On a tous notre Panthéon (« ce chef, c’est celui qui m’a le plus appris dans ma carrière ») et notre enfer (« ce chef, quelle horreur ; il m’aura vraiment démotivé »).

Alors, pour être ce leader inspirant, qui donne envie, qui fait adhérer les équipes et les collaborateurs, qui entre au Panthéon de ses collaborateurs, que faut-il faire ? Voilà une bien épineuse question que l’on pose parfois à un consultant…

Pour répondre, il serait erroné de croire qu’il existerait un ensemble de « trucs » applicables partout qui provoquerait cette magie de l’adhésion pour tous.

En fait, la première question est d’être capable de sentir et de porter attention à ce qui inspire les gens, et chaque personne en particulier, et nos collaborateurs, chacun étant différent de l’autre.

Cela n’est pas du tout fondé sur des actions qu’il suffirait d’engager à la lettre, mais d’abord sur l’écoute. Et pour écouter encore mieux, quoi de mieux que de demander  à nos collaborateurs : « Racontes-moi un moment, une occasion, où tu étais à ton meilleur ; Qu’est-ce qui t’as inspiré ? ». Cette forme d’interrogation dite de « Appreciative Inquiry », est très populaire dans les démarches anglo-saxonnes (à partir des travaux de David L. Cooperrider, qui en est l’initiateur). Et si on ne le demande pas, on peut l’observer à ces moments inspirants, lorsque le collaborateur est enthousiaste ; ou qu’il exprime un fort contentement.

Le leader inspirant est celui qui va chercher ce qui inspire ses collaborateurs, et le fait grandir.

Cette attitude est un choix qui, plus il est fait consciemment, plus il génère les résultats. C'est-à-dire qu’il entraîne l’équipe à nous suivre et à se dépasser.

Il existe un conte, dit des deux loups,  racontant l’histoire d’un indien Cherokee s’adressant à son petit fils qui illustre bien ce propos.

Ce vieil indien Cherokee dit à son petit fils : «  Mon fils, il y a à l’intérieur de chacun de nous une bataille entre deux loups. L’un est mauvais. C’est la colère, l’envie, la jalousie, la tristesse, le regret, l’avarice, l’arrogance, l’apitoiement sur soi, la culpabilité, le ressentiment, le complexe d’infériorité, le mensonge, la dissimulation, la fausse fierté, le complexe de supériorité.

L’autre est bon. C’est la joie, la paix, l’amour, l’espoir, la sérénité, l’humilité, la gentillesse, le bénévolat, l’empathie, la générosité, la confiance, la compassion, et la foi ».

Le petit fils écouta et réfléchit pendant un long moment. Et il demanda alors à son grand-père : « Lequel de ces deux loups gagne finalement la bataille ? ».

Le grand-père eut un sourire et répondit : «  Celui que tu nourris ».

Ce que nous enseigne l’Appreciative Inquiry, c’est précisément d’inspirer les autres en donnant à manger au bon loup.

Là où ce loup gentil est difficile à trouver, c’est précisément quand nous sommes face à une performance défaillante de nos collaborateurs, que nous percevons tout ce qui ne va pas. Alors le loup mauvais est tout près de nous, il sent qu’il va peut-être recevoir une part de nourriture ; il nous tourne autour. C’est précisément à ce moment qu’il ne faut pas perdre de vue ni abandonner le loup gentil.

Autre  moment difficile, c’est quand nous sommes confrontés à une performance exceptionnelle d’un collaborateur. Le loup mauvais nous avertit : « Mais pourquoi voudrais-tu dire merci ou des choses gentilles à ce collaborateur ? Après tout, s’il travaille bien, c’est qu’il ne fait que bien faire le travail qu’on lui demande. On n’a pas à récompenser pour ça ». Et si on l’écoute, on affame le loup gentil, qui a tant besoin de nous à ce moment aussi, comme quand ça ne va pas.

Pour toujours nourrir le loup gentil, l’ « Appreciative leader » est celui qui pense toujours à dire merci, à exprimer des appréciations positives chaque fois qu’approprié. C’est simple, c’est facile ? Pas si sûr.

Forcément, tout ça va paraître naïf, un peu idéaliste, que sais-je, à certains.

Grâce à eux, les loups méchants ne sont pas près de mourir de faim.

Pour les autres, ils en retireront la gratitude des loups gentils.

Il suffit de choisir.

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