Le vrai prix de l’informatique

Fred_metey_1Par Fred Metey (contributeur) – Entrepreneur

L’informatique s’est démocratisée. Objectivement, si on regarde le taux d’équipement des particuliers, il est certain que cette technologie est entrée dans les foyers, tous les foyers. Plusieurs raisons à cela, à commencer par la révolution Internet qui a touché le grand public à partir de l’hiver 1999-2000 et vraiment depuis 3 ou 4 ans, mais aussi bien sûr la baisse du prix des équipements.

Pourtant, l’informatique n’est à mon sens pas moins chère, et probablement beaucoup plus si on ne regarde pas que le prix des machines et de leurs écrans. Elle est juste devenue incontournable, très utile et utilisée, productive dans un nombre considérable d’aspects de nos vies, et surtout, beaucoup de gens ignorent ou préfèrent ignorer la réalité du coût de l’informatique, quitte à prendre des risques déraisonnables souvent, si l’on prend en compte l’importance de ce que nous confions à cet outil.

Le vrai prix de l’informatique, c’est :

  • la formation
  • la sécurité de ce qu’on y stocke
  • la qualité de l’outil
  • et hélas aussi le dépannage ou au moins la maintenance.

Les cabinets de conseil ont même depuis longtemps conceptualisé ce prix pour les entreprises sous le sigle TCO, acronyme des termes qui en anglais signifient "coût total de possession"
(total cost of ownership). Et si ce prix est connu dans les grosses
boîtes, les particuliers et les petites structures l’oublient en
général totalement, en particulier lors de l’achat de leur machine.

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Avec la double casquette de formateur et dépanneur, VAR21 est bien placé pour constater que nombre de problèmes surgissent d’une utilisation mal maîtrisée.

  • Parce que le client se trompe.
  • Parce que le client se fait abuser par les escrocs qui savent
    présenter leurs pubs, leurs pièges ou leurs messages de façon à
    "planter" l’internaute moyen (dont les connaissances sont
    insuffisantes, et l’esprit critique trop peu aiguisé).
  • Aussi parce que les machines en font de plus en plus, et se complexifient forcément, malgré les progrès ergonomiques pas toujours parfaits, ni forcément toujours traduits de façon satisfaisante.

Le besoin de formation est trop négligé, d’autant que chaque
utilisateur s’aperçoit en progressant que l’informatique est un champ
très vaste qui tend vers l’infini. L’autoformation des autodidactes
n’est pas possible pour tout le monde, et suppose a minima un goût
prononcé pour la technique, car une chose est sûre, elle va vous
demander beaucoup de temps, de recherches, et de lecture pour arriver
au même résultat qu’un bon cours. Et parfois il faut simplement faire
faire les choses par quelqu’un qui sait (et ce n’est pas parce que la
cousine Berthe est comptable et passe la journée face à un ordinateur –
mais sur un programme strictement comptable – qu’elle est
miraculeusement capable de résoudre les problèmes liés à
l’informatique).

L’autre aspect très coûteux si on veut faire bien les choses, c’est la sécurisation des données
: automatique de préférence (car personne ne s’oblige à faire
suffisamment de sauvegardes régulièrement), déportée idéalement (si on
vous vole votre disque dur externe de sauvegarde en même temps que la
machine dont il copie les données, vous voilà bien avancé). Ca voudrait
dire qu’au moins pour ce que vous ne voulez absolument pas perdre, il
faut louer de l’espace en ligne pour vos copies de secours, avec un
logiciel qui se charge de les faire, tout seul. Et je suis surpris de
voir combien de gens confient comme moi à leur ordinateur une part de
plus en plus grande de leur vie, et n’ont même pas une copie des
dossiers fondamentaux ou intimes sur quelques DVD chez un parent (ou au
coffre à la banque). C’est le moins cher, mais c’est aussi très peu
réaliste : personne ou presque ne s’astreint à cette obligation.

Personne ne faisant ces dépenses comme elles le devraient,
c’est un troisième poste de dépense qui prend le pas : l’assistance
d’urgence
, et ça coûte cher. L’autre option, c’est d’assumer
la catastrophe quand elle survient. Et comme l’expliquait Kipling à son
fils pour en faire un homme, "sans un mot, se mettre à rebâtir".

C’est une sorte de loterie, où l’on sait par exemple que les disques durs connaîtront la défaillance dans près d’un cas sur 10.
Pour vos ordinateurs, ça va concerner lequel : l’actuel, celui de votre
étudiant de fiston, ou votre prochaine machine. Chacun prie pour avoir
le dieu des statistiques avec soi, mais si vous avez encore 5
ordinateurs à utiliser d’ici la fin de votre vie, ça vous fait une
chance sur 2 pour la seule panne disque dur… A ce compte-là, il faut
être sacrément joueur, car plus le temps passera, et plus votre
ordinateur contiendra de données qui vous seront essentielles.

En général, c’est à l’occasion de ces catastrophes que nous
rencontrons nos clients la première fois. C’est vrai que de ce point de
vue, c’est bon pour le business. Mais tout est relatif, car c’est aussi
la partie la moins drôle et la moins facile : placés dans l’urgence,
avec un enjeu majeur (normalement on nous demande toujours un miracle),
et face à un client qui ne peut pas s’offrir un miracle non budgété, ce
n’est pas la partie du boulot que j’apprécie, même si nos "miracles"
sont très chaleureusement admirés et valorisants quand ils sont
possibles à un prix accepté.

Je viens ci-dessus de zapper la qualité de l’outil.
C’est le point qui fera le plus débat. Pourtant, bon nombre de
personnes achètent leur informatique sur la seule lecture d’une
étiquette de prix, mais une bonne part exprimera tôt ou tard une
insatisfaction logique : que ce soit le bruit de l’appareil ou tout
autre point relatif à la qualité des composants, on doit bien
comprendre qu’à 700 euros, et à 2500 euros, on n’a pas affaire aux
mêmes machines.

Et si beaucoup croient que leurs besoins sont basiques,
ils se brident d’eux-mêmes avec des ordinateurs qui leur interdisent la
découverte de certains usages.
Celui qui a perdu son téléphone
et a dû ressaisir tout son répertoire (ou s’en passer), comprendra
certainement l’intérêt de pouvoir synchroniser (quotidiennement et
simplement) son téléphone avec un répertoire inclus dans l’ordinateur.
Mais ça suppose au minimum de pouvoir établir la liaison,
matériellement (et de préférence sans fil), et via un programme décent.
Certains opérateurs proposent cette sauvegarde du téléphone, je sais,
mais ce n’est qu’un exemple, et on pourrait les multiplier, ne serait-ce qu’en parlant de la photo
: aujourd’hui, l’argentique a hélas totalement perdu la bataille, et
l’intrusion de la photo numérique nous pousse à tous gérer un flot
croissant et massif de clichés de nos vies, qu’il va bien falloir ou
laisser moisir comme nos anciens albums papier, ou bien traiter avec de
l’espace, de la fiabilité, et un peu de puissance plus ergonomie… Et
je ne parle même pas des notions de partage de ces photos : de bonnes
solutions existent, mais elles demandent un peu d’investissement…

Enfin, si la machine correspond à vos usages
d’aujourd’hui, anticipez : dans 3 ans, vous savez que les programmes
qui correspondront à l’évolution des choses (et à la vôtre), exigeront
plus de tout, c’est la loi du genre
. Et quand vous voudrez les
installer, vous découvrirez que la machine juste satisfaisante hier
vous coupe les ailes à présent. Alors oui, vous pourrez dire : je fais
que très peu de choses, toujours les mêmes. Et vous regarderez passer
le coche. En informatique, le premier prix n’est jamais le bon choix,
ou rarement.

Je vous livre la seule objection valable à mon
argumentaire : hélas, un prix élevé n’est pas systématiquement gage de
qualité, et encore moins de garantie contre tous les problèmes…

Mais on améliore ses chances, et quand même souvent son confort et sa
productivité (le temps passé sur l’outil pour obtenir un résultat
identique).