L’entrepreneur du XXIème siècle

Martingilles Par Gilles Martin (chroniqueur exclusif) – Président du cabinet de conseil en stratégie et management PMP

Se dire entrepreneur, c’est, pour de nombreuses personnes, dire du bien de soi.

Car quand on parle d’entrepreneur, on ne parle plus seulement des vrais, ceux qui ont monté leur boîte, qui vont chercher les clients, développent les produits et les services, les petits, et les grands, patrons.

Non, on colle aussi le nom d’entrepreneurs à tous ceux, y compris les salariés des entreprises, et aussi les fonctionnaires, qui prennent des initiatives, qui se bougent, qui lancent et font réussir des projets, qui se comportent comme si ils étaient des chefs d’entreprise. On les nomme parfois les «  intrapreneurs ».

Mais voilà, vous avez dû le remarquer, certains de ces individus qui se prennent pour des «  entrepreneurs » ou des « intrapreneurs » sont particulièrement agaçants pour leur entourage.

Ce sont ces individus pour qui, être entrepreneur, ça consiste à tout contrôler, pas dépenser trop, à être opportuniste en toute occasion. C’est ceux qui masquent leur profond matérialisme derrière ce qualificatif d « entrepreneur » : Pour eux, ce qui compte, c’est d’accumuler les richesses, les revenus, ou bien d’améliorer leur image, d’accroître leur célébrité. Ils doublent tout le monde, ils se réjouissent bruyamment de leurs succès ; on dit d’eux qu’il « écrasent les autres ». Ce sont souvent des gens hyperactifs, qui s’isolent de leurs pairs, sont plus possessifs, moins généreux, plus envieux, moins confiants. Ils ont parfois des difficultés à contrôler leurs pulsions. Pour eux, ce qui compte, c’est leur réussite, et les autres ne sont qu’un moyen de promouvoir leur ambition personnelle ( qui se résume à gagner de l’argent et connaître le bonheur matériel).

Quand on en est là, on va avoir tendance à dévaloriser les autres, à se couper de l’affection et de la compagnie des semblables. La seule valeur qui monte est notre sentiment d’aliénation.

Cette dévalorisation des autres qui caractérise ces drôles d’ "entrepreneurs" a bien sûr de multiples impacts sur leur psychisme. Parce qu’ils ne pensent qu’à eux-mêmes ils supposent que tout le monde ressent les choses à leur façon – après tout c’est la «  nature humaine » – L’efficacité, ça consiste à bien faire le business, à faire cracher les clients, à bouger les fainéants ; pas de pitié pour les tire-aux-flancs !  Plus on est haut dans cette attitude matérialiste, plus on se méfie des autres en fait.

Ces «  entrepreneurs » qui agacent tout leur entourage, qui écrabouillent tout sur leur passage,  ce sont ceux qui vont disparaître, qui n’ont plus leur place dans le monde qu’entrevoit Jeremy Rifkin, un auteur américain, dans son dernier livre «  Une nouvelle conscience pour un monde en crise – Vers une civilisation de l’empathie ». Pour lui, c’est précisément ce sentiment empathique, cette attention aux autres, au point de se mettre à leur place, qui nous permettra de passer ce qu’il appelle la troisième révolution industrielle. 

Dans ce monde, le moteur le plus profond est précisément ce lien empathique. Cette confiance, cette capacité à créer les liens entre les personnes. Dans un monde en réseaux, dans ce que Rifkin appelle le «  capitalisme distribué », ce n’est plus la propriété ( «  ça m’appartient ») qui sera déterminante, mais l’appartenance aux bons réseaux, l’accès ( «  «  j’appartiens à »). Cela consiste à se donner de nouveaux horizons, des ambitions plus humanistes, même et surtout pour les entrepreneurs. On passe au monde de l’ampleur et de l’abondance.

Internet aura appris à toute une génération de jeunes d’entrer en relation entre eux et avec le monde d’une façon non hiérarchique, en réseau. Et cette société distribuée, coopérative, est forcément une société plus empathique. Ce sont ceux qui seront le plus adaptés à cette société empathique qui seront les meilleurs entrepreneurs et intrapreneurs.

La transparence qu’appellent ces nouveaux modes de relations ne consiste pas seulement à partager l’information mais aussi à faire preuve d’une authentique ouverture aux autres sur ses sentiments, ses idées et ses actes.

Alors souhaitons que les entrepreneurs du XXIème siècle épousent en masse ces tendances ; et éloignent  ces personnages agaçants et pleins d’égoïsme, qui ne font pas seulement du mal à leur entourage, mais aussi aux entrepreneurs eux-mêmes dans leur ensemble.

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