Par Patrick Rey (chroniqueur exclusif) - Consultant-Délégué ITG, premier groupe de conseil en portage salarial.
A l'occasion de la présentation du “projet de loi pour la croissance et l'activité”, expliqué il y a quelques jours par le jeune ministre qui fait de la “macron… économie”, il est clair que les entrepreneurs cherchent, comme le gouvernement, à favoriser de la croissance, de l’investissement et de l’emploi. Qu'en est-il des entrepreneurs individuels, première étape habituelle ou unique étape de beaucoup de porteurs de projets ?
Comme le titre le projet de loi, il s'agit de relancer, re-démarrer, et de développer de l'activité. Un écho au plus ou moins apprécié “travailler plus pour gagner plus” d'un autre gouvernement, avec l'extension du travail le dimanche, que les journalistes ont beaucoup mis en avant. De même, le régime d'auto-entrepreneur de l'époque précédente se voulait un tremplin vers la création d'activité, à défaut d'une réelle entreprise pérenne.
En réalité, un des bénéfices de ce régime spécial du statut d'entreprise individuelle a surtout été celui des pays anglo-saxons qui l'appellent auto-emploi (self-employed). Sauf que ce n'est pas vraiment un emploi au sens habituel mais une activité : activité non salariée, par exemple activité libérale. Un entrepreneur individuel crée donc avant tout une activité, la sienne. Ce qu'il a entrepris s'appelle peut-être une entreprise, sauf qu'une véritable entreprise c'est un collectif humain* : un groupement d'associés, de partenaires ou de salariés, ou tout ça à la fois lorsqu'elle se développe. Et c'est ce qu'on appelle une société…
A quelques jours de la fusion des différents régimes de micro-entreprise (avant celle des différentes entreprises individuelles plus tard) et de la loi encadrant le portage salarial, deux des dispositifs de création d'activité vont consolider leur ancrage dans le paysage économique français. Et au passage améliorer la sécurité tant pour les personnes que pour les entreprises qui sont leurs clients.
Comme je l'ai écrit plusieurs fois, dans cette chronique mensuelle, le travailleur solo ne doit pas rester seul, particulièrement dans le domaine du service aux entreprises. Des associations et organismes proposent aux auto-entrepreneurs un accompagnement, même s'il est moindre que celui des couveuses d'entreprises ou coopératives d'entrepreneurs. Les entreprises de portage salarial doivent (ou devront) apporter conseils, formations et autres services aux professionnels portés.
L'intérêt de raisonner “activité” plutôt que seulement “emploi” est évident : une entreprise ça va ça vient, une entreprise individuelle plus encore, l'économie ça va ça vient, les véritables entreprises plus encore, puisque ce sont des collectifs humains. Même l'emploi ça va ça vient, et en ce moment ça vient pas beaucoup : trop jeune, trop vieux, trop cher, trop diplômé, trop loin du job attendu … ! D'où l'accroissement des transitions professionnelles** : je quitte mon emploi, je crée mon activité, je préfère ensuite devenir salarié porté, salarié coopérateur, tout en restant indépendant, je crée mon entreprise… ou le contraire.
(*) Ce que rappelait Jean-Luc Mélenchon il y a quelques semaines dans une interview matinale sur RTL. Pour lui, toutefois, seul compte le collectif de salariés. Il oublie par exemple les coopératives agricoles ou les nouvelles SCOP (sociétés coopératives et participatives) qui réunissent des personnes associées au capital et aux décisions.
(**) La Fondation ITG a demandé comment plusieurs pays européens traitaient ces questions de l'autonomie, des mobilités et des transitions professionnelles. Lire cette étude et les propositions pour débloquer, accompagner et fluidifier ces transitions.