Par Patrick Rey (chroniqueur exclusif) - Consultant-Délégué ITG (Institut du Temps Géré), premier groupe de conseil en portage salarial.
“Stimuler l'esprit d'entreprise, c'est d'abord le rôle de l'école”, déclarait le Président fin avril. Des réactions à 180°ont accueilli l'annonce faite aux Assises de l'entrepreneuriat. Satisfaction polie des chefs d'entreprise qui savent pour autant que le chemin sera long. Fronde de principe de la part de certains milieux enseignants fortement politisés qui dénoncent l'idéologie (sic !) capitaliste en militant pour la laïcité et une non contamination avec le mal absolu selon eux.
L'idée n'est pas neuve, et de nombreuses initiatives existent, certes éparpillées ou modestes, à commencer par ce blog lancé et animé par Olivier Marone, avec les contributions, témoignages et conseils de toutes sortes de personnes qui ont envie d'entreprendre, ont un projet, ont commencé, continué, abandonné et des personnes qui suivent ces entrepreneurs, les accompagnent ou simplement les observent. Pour autant, ce qui est intéressant est de s'adresser aux élèves et étudiants, donc bien avant qu'ils aient développé une envie ou idée d'entreprise ou aient acquis le rejet d'entreprendre, à moins qu'ils se perdent dans les méandres de l'hésitation prolongée de l'adulescence.
L'idée développée par le ministre du redressement productif* (qui l'eut cru ?) est que “l’efficacité [des] politiques de soutien à la création et à la reprise d’entreprise […] ne porteront pleinement leurs fruits que si l’ensemble des acteurs du développement économique — au rang desquels se trouvent aussi les acteurs éducatifs — participent au développement de l'esprit d'entreprendre dans notre pays.” On ne sait pas encore quelles formes prendra ce “parcours école entreprise” que déjà certains syndicats rétorquent que “l’école n’est pas là pour « stimuler l’esprit d’entreprise » mais qu’elle se doit de former les élèves, y compris dans sa dimension critique, à la connaissance de l’entreprise dans toute sa complexité (organisation, formes de propriété, collectifs de travail, défense des salariés….), ce qui se fait déjà largement au collège et au lycée” (dixit le FSU).
Former les élèves, telle devrait être en effet la mission de l'école. D'abord les former aux bases qui leur seront indispensables quel que soit leur métier : lire, écrire, compter. Hélas, on sait que l'école tient de moins en moins ces objectifs essentiels. On sait que certaines écoles d'ingénieurs ont décidé de le faire pour les étudiants qui ne maîtrisent pas ces savoirs de base, après le primaire et le secondaire !! Découvrir les différentes formes d'emploi — privé, public, productif, artisanal, intellectuel, recherche, etc. — le plus tôt possible est également très utile. Faut-il laisser cet enseignement, ces rencontres, ces activités sous la seule responsabilité des enseignants ? Bien évidemment, non. Ne serait-ce que pour que le jeune se fasse son idée, en comparant les perspectives des différents acteurs, ayant appris (peut-être !?) à se faire un jugement entre ce que certains considèrent comme une idéologie de l'autre partie.
Il reste donc un immense chantier à réaliser, qui à mon avis passe forcément par la fertilisation croisée (comme on dit), à savoir les échanges réels entre le monde des entreprises de toute forme, taille et secteur et ceux de la formation première et continue. Des entrepreneurs qui deviennent enseignants/formateurs, des enseignants/formateurs qui deviennent entrepreneurs. Cultiver l'esprit d'entreprise dès l'école est donc une nécessité pour donner envie … de faire ou ne pas faire, mais avec une meilleure conscience, une meilleure connaissance et un esprit critique.
(*) lire le communiqué de presse