Maturité : redevenir l’enfant qui dit oui

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Gilles Martinar Gilles Martin (chroniqueur exclusif) - Président du cabinet de conseil en stratégie et management PMP

Se sentir adulte, grand, c’est comme se dire, et le faire
savoir aux autres : «  je ne suis plus un enfant, je suis un adulte,
je suis grand, je sais ce que j’ai à faire».

Qui parle ainsi ?

C’est quelqu’un qui considère que le temps qui passe, qui a
rendu son corps plus vieux, et son expérience professionnelle et de la vie, en
ont fait un vrai, un grand, un adulte. Et c’est justement en l’entendant clamer
« je suis un grand », comme un enfant qui tient tête à l’autorité,
que l’on se met à douter de sa maturité.

Car ce qui fait la maturité n’est justement pas le
vieillissement, ni même l’expérience.

Nous vieillissons tous, nous passons au travers
d’expériences professionnelles et personnelles nombreuses, et pourtant, ce que
l’on va appeler maturité, c’est un petit (ou un grand) quelque chose en plus.

Pour un entrepreneur, un dirigeant, un manager aussi, la
distinction est d’importance : on peut parcourir sa vie, et passer succès
et échecs, comme des hypnotisés ; sans être attentif à ce qui se passe.
Les choses se produisent, mais passent à côté de nous, sans laisser de marque
suffisante. Cela ne se transforme pas en sagesse, et cela ne fait pas grandir,
seulement vieillir. Dans un langage plus familier, on dirait que c’est comme ça
que l’on devient « un vieux con ». Et il suffit de l’évoquer pour
s’apercevoir qu’on en connaît beaucoup.

Mais on peut aussi s’effrayer de la peur d’en devenir un
soi-même, et plus vite qu’on ne croit.

C’est pourquoi il n’est pas inutile de revenir à ce qui fait
vraiment la maturité, par exemple dans les ouvrages de  Osho, dont l’un est précisément consacré à la
maturité.

On comprend alors que la maturité n’a rien à voir avec les
expériences de la vie, quelles qu’elles soient. Elle a à voir avec notre voyage
intérieur, avec notre expérience de ce qui est intérieur.

Il ne s’agit pas d’accumuler les postures et les
comportements, ni même les connaissances, que l’on va chercher à l’extérieur,
en tentant de copier les « grands » entrepreneurs, les
« grands » managers, les « grands » patrons, tout ce à quoi
on aimerait ressembler. Tout cela ne fera que de nous habiller d’une armure
dont on deviendra le prisonnier, comme le chevalier à l’armure rouillée du
célèbre conte. (Histoire d’un chevalier fier de son armure mais qui n’arrive
plus à l’enlever alors qu’elle est en train de rouiller, et l’empêche de
communiquer vraiment et sincèrement avec les autres).

Non, la maturité consiste à aller de plus en plus
profondément en soi-même. C’est une progression verticale, comme un arbre qui
enfonce ses racines dans le sol pour grandir, et non horizontale (plus de la
même chose, plus de croissance, plus de connaissance, plus de pouvoir, plus de
richesse, plus d’amis sur Facebook,…). Être parfaitement mûr, c’est atteindre le
centre même de son être.

Dans cette vision, la maturité ne consiste pas à perdre son
innocence, à devenir comme un roc, solide, sûr de lui, puissant. Elle est au
contraire de devenir vulnérable et simple.

C’est pourquoi la meilleure image pour évoquer la maturité
est celle de redevenir un enfant, dans cette vulnérabilité, dans cette
simplicité. Mais pas le même enfant que l’enfant du début. La maturité consiste
à être ce que l’on est, sans essayer d’être quelqu’un d’autre. C’est pourquoi
ceux qui prennent toujours les autres et leurs opinions en considération, pour
les copier, ou s’y opposer, restent au fond immatures car, dépendant de
l’opinion d’autrui, ils ne peuvent rien faire de façon authentique, ni ne
peuvent dire ce qu’ils ont à dire, préférant souvent dire ce que les autres
veulent entendre, ou inversement se créer un personnage en s’opposant aux
autres.

Autre signe à observer : la capacité à dire non. Cela
est le signe ultime de la liberté et la preuve qu’on est un
« grand «  pour beaucoup : dire non, c’est  s’affirmer, c’est dire ce que l’on a à dire.
Alors que dire oui, c’est un signe de soumission, il n’y a pas besoin
d’argumenter, ni de raisonner, on a dit oui. Dire non passe au contraire pour
un signe d’intelligence ; et le pourquoi qui suit permet d’expliquer, de
raisonner ; dire non, c’est un style, une liberté, une intelligence. C’est
pourquoi on pense que pour grandir il faut dire non, non, et non.

Devenir mature, c’est précisément l’inverse : c’est
pouvoir dire oui et rester libre. La liberté que donne le non est somme toute
une liberté très infantile ; continuer ainsi toute sa vie, c’est arrêter
de grandir. La croissance ultime c’est de dire oui avec la même joie qu’un
enfant qui dit non. C’est pour ça que l’on peut la considérer comme une
deuxième enfance .Car celui qui peut dire oui sans hésitation, avec une immense
liberté, sans conditions, devient sage. Osho ne nous dit pas, d’ailleurs, de ne
pas apprendre à dire non, c’est parfois nécessaire, mais il nous enseigne à ne
pas nous y retrouver coincés.

Pas facile la maturité, vue comme cela. Au lieu de jouer au
grand, de s’enfermer dans tout ce que l’on croit savoir, elle consiste à
redevenir innocent, à se sentir vulnérable. Redevenir innocent, c’est laisser
tomber le mental, tout ce qui est emprunté, tout ce qui a été donné par les
autres, pour se retrouver en son centre, simple, comme un enfant, comme dans
une méditation. Et trouver toute sa puissance mature ainsi.

Evidemment, ceux qui 
resteront bloqués sur l’infantilisme de « je ne suis plus un
enfant » auront plus de mal à franchir cette étape ; mais qui
sait ? Il suffit peut-être de leur montrer notre sourire d’enfant et de
leur dire oui.

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