Portage salarial : quand l’essayer devient l’adopter

Rey_patrickPar Patrick Rey (chroniqueur exclusif) – Consultant, Délégué Régional du Groupe ITG

Il est commun de dire que le portage salarial permet de tester son activité, avant de créer son entreprise. On entend également souvent dire que c'est une solution de transition, avant d’autres développements professionnels, ou avant la retraite, pour les salariés licenciés, par exemple. Alors, comment expliquer que plus de 30% des “portés” chez ITG ont plus de 3 ans d’ancienneté ? Pourquoi ces personnes restent-elles en portage. Quels avantages y trouvent-elles ?

Tester son activité, développer sa clientèle, perfectionner ses méthodes, élargir son réseau, ce sont quelques-uns des objectifs des nouveaux entrants. Pour les personnes qui n’avaient pas imaginé créer leur propre emploi, il est bien normal de chercher une couveuse pour faire éclore son projet dans les meilleures conditions. Un certain nombre de structures s’y consacrent, depuis les Coopératives d’Activité et d’Emploi jusqu’aux plus importantes sociétés de portage salarial. En échangeant avec d’autres porteurs de projet, en bénéficiant des conseils, de l’expérience et des moyens de formation de ces structures, ces personnes se confrontent avec la réalité du marché.

Pour les CAE, il s’agit surtout de se cibler sur le marché local, notamment pour les activités de service de proximité ou par exemple pour tout ce qui est artisanal ou de type manuel. Pour les principaux acteurs du portage salarial, il s’agit du marché de la prestation intellectuelle, dans lequel le côté local a peu ou pas d’intérêt. Le professionnalisme des métiers du conseil, de la formation ou de l’expertise fonctionnelle réclame des moyens et des équipes habituées à ce type d'accompagnement.

Au bout d’un an ou deux, on observe différents cas de figure :

• la personne n’a pas réussi à devenir autonome ; c’est là que la taille de la structure, la qualité du réseau, les moyens de formation et d’accompagnement font la différence pour rebondir, en remettant à plat son projet, sans doute mal défini au départ, ou mal évalué pour des raisons endogènes et/ou exogènes,

• la personne a préféré reprendre un emploi salarié, à l’issue d’une mission chez un client, ou d’une opportunité saisie lors d’une action commerciale ou de réseau,

• la personne a trouvé ses marques, tant d’un point de vue métier que financier ; elle peut “voler de ses propres ailes”.

C’est alors que l’alternative se présente : soit créer son entreprise, soit continuer en portage. Même si elles semblent opposées, ces deux options se ressemblent beaucoup. C’est ce que j’observe de plus en plus. Car, pour durer, dans les deux cas, il faut une même envie d’entreprendre, une même offre de service bien “packagée”, un même sens de l’économie des moyens, une même orientation vers l’action, et une claire perception des éléments de base de gestion de son activité.

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Pour illustrer ma constatation, j’ai pu observer récemment les évolutions intéressantes de la Chambre Professionnelle des Conseils, du moins celle que je connais bien : la CPC du Grand Sud-Ouest. Il y a deux semaines, elle avait organisé les Ateliers du Conseil. Tant au travers des interventions en plénière, que lors des échanges informels de la journée, ou plus encore à l’occasion de l’atelier auquel j’ai participé, il ne fait pas de doute que ces professionnels sont des acteurs sérieux du conseil, parfaitement au niveau des portés les plus autonomes et les plus entrepreneurs.

Parmi les débats qui ont eu lieu au sein du bureau de la CPC, il y avait la question de savoir si les indépendants “portés” pouvaient être acceptés comme membres de la Chambre Professionnelle et celle de savoir s’il fallait rendre obligatoire la souscription à une assurance RCP (responsabilité civile professionnelle) pour entrer à la CPC. Sur la première question, il a été convenu que le professionnel du Conseil qui choisit de se faire porter au départ pourrait être admis comme “membre stagiaire”, mais qu’il devrait créer ensuite son entreprise pour devenir membre de plein droit. Sur la seconde question, pas d’accord des membres du bureau pour rendre obligatoire la RCP.

Qui est donc le plus entrepreneur ? Celui qui se met en Entreprise Individuelle ? En EURL ? En SARL ? Bientôt celui qui choisira le statut d’auto-entrepreneur (je blague ! mais pas tant que ça, comme indiqué dans ma chronique d'octobre) ? Ou bien celui qui opte pour le portage salarial et y reste ? Avec les sociétés sérieuses de portage salarial, la RCP est naturellement incluse dans les frais de gestion, pas oubliée ou pire encore cachée dans les charges patronales figurant dans les retenues de salaire, pour pouvoir présenter un taux de gestion plus attractif, en apparence. Avec les porteurs les plus avancés, on peut aussi déduire ses frais professionnels et récupérer la TVA, pleinement restituée au consultant salarié. De même, on peut maximiser ses revenus totaux grâce au PEE ou aux titres CESU pré-financés. Enfin, les frais de gestion — improprement appelés “commissions” par certains — baissent au fur et à mesure que le CA se développe.

Au total, les différences entre les statuts sont ténues, si on étudie attentivement le quantitatif et le qualitatif. Ceci suppose de sortir des idées reçues et des a priori négatifs provoqués par les incompétents et les profiteurs du portage. La véritable différence est une question de motivation personnelle. D'un côté, il est parfaitement naturel de préférer créer son entreprise, même quand on est un consultant individuel. De l'autre, choisir le portage comme solution durable, c'est l’intérêt bien compris d’un nombre croissant de professionnels autonomes.

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