Par Bertrand Duperrin (chroniqueur exclusif) – Consultant en Management
Ca n’est pas une nouveauté mais à entendre les recruteurs c’est plus
que jamais d’actualité : il est de plus en plus impératif de séduire
ses futurs collaborateurs. Partant de là deux techniques sont
possibles, qui amènent à des résultats radicalement différents à moyen
terme :
– séduire "large" en montrant que l’on correspond aux attentes du plus
grand nombre
– réduire la cible en excluant ceux qui ne nous ressemblent pas
A priori la première solution est la plus sécurisante dans un contexte
de concurrence accrue sur le marché de l’emploi ou nombre
d’entreprises se disputent un vivier finalement réduit de candidats.
La seconde option, parce qu’elle exclut, peut paraître paradoxale dans
ce même contexte.
A posteriori on se rend souvent compte que la seconde méthode a des
effets bénéfiques à plus long termes : un turnover plus faible, un
engagement supérieur, une plus forte cohésion, bref un meilleur
alignement à la fois entre les individus mais également entre
l’entreprise et les individus. Où l’on se rapproche qu’un bon
recrutement n’est pas forcément une sélection mais un bon rapprochement.
Reste que se demander qui on est et ce qui fait que l’on réussit n’est
pas sans quelques surprises pour peu qu’on ait le courage de
l’entendre et d’en tirer toutes les conséquences. Le meilleur exemple
est probablement celui de Danone qui a interrogé son écosystème sur la
question "qu’est ce qui fait notre force ?". Alors que la réponse
attendue était "les marques", le résultat a donné "la culture" (les
personnes interrogées étaient également des extérieurs à l’entreprise,
clients, partenaires….). Conclusion : la culture est un facteur de
performance et la manière dont on opère le business est tout aussi
importante que le business par lui-même. Cette culture se traduit par
une manière de travailler, un mode de management, des valeurs avec
lequel tout le monde ne peut pas être à l’aise, mais le choix a été
fait de privilégier cet aspect dans le recrutement, plutôt que
recruter large et pénaliser la performance en se focalisant que sur
les qualités professionnelles stricto sensu. Rien ne sert d’avoir les
meilleurs solistes s’ils ne partagent des valeurs communes pour mieux
jouer ensemble.
Les exemples allant dans ce sens sont de plus en plus nombreux. Qu’en
retenir
• Qu’il vaut mieux se rapprocher de ceux qui sont comme nous que
plaire au plus grand nombre.
• Qu’il faut se garder de croire que l’on sait a priori ce qu’on est.
• Qu’à l’heure de se poser la question il est tout aussi important de
recueillir des avis de l’extérieur de l’entreprise, pas seulement des
collaborateurs
• Qu’il est plus efficace (et rentable) d’assumer ce qu’on est plutôt
que de faire croire qu’on est ce qu’on est pas.
• Que l’aspect purement professionnel (cv, diplôme) ne rend pas compte
de la capacité de l’individu à créer de la valeur au sein d’un groupe.
Que des choses dont tout le monde est heureusement conscient (ou
presque) mais qui sont trop souvent oubliées au moment de passer à
l’action. Un signe encourageant, j’ai l’impression que nombre
d’entreprises délaissent la première voie pour la seconde en essayant
de se rapprocher plus que de séduire.