« Suspects, prospects, clients » : Le CRM en questions – suite


Par Philippe Guihéneuc (chroniqueur exclusif) – Directeur Associé – Highburry

Les questions à se poser sur l’exploitation d’un CRM
– 1er partie ici

Au terme d’un processus de sélection plus ou moins long (cf. article précédent, « Le CRM en questions »), vous avez choisi un logiciel de gestion de la relation clients . Bravo ! Il faut maintenant que vous l’installiez, puis que vous l’utilisiez, puis que vous en mesuriez les effets.

Qu’attendez-vous de votre logiciel ?

Les décideurs considèrent habituellement que l’évaluation de l’efficacité d’un CRM est quasiment impossible. Elle dépend d’un trop grand nombre de facteurs subjectifs, comme le temps réellement passé par les utilisateurs pour se l’approprier, ou l’impact de l’outil sur la productivité, et de la productivité sur les ventes. Combien de temps gagnerez-vous à ne plus chercher partout le dernier email de votre prospect ? L’utilisation d’un template standard de proposition affectera-il sérieusement la décision d’un client sur une nouvelle commande ? Quel est l’effet du taux de délivrabilité constaté du logiciel, en regard du coût d’acquisition des adresses email et des taux de conversion en ventes ? Autant de questions aux réponses improbables.

Il existe pourtant une méthode simple pour mesurer l’impact de votre CRM sur votre activité marketing et commerciale. Une méthode loin d’être parfaite mais simple à mettre en œuvre, et produisant des résultats facilement mesurables.

Elle consiste à administrer un questionnaire d’évaluation des performances de l’équipe commerciale, ou de l’équipe marketing, bref des équipes amenées à utiliser le logiciel. Ce questionnaire peut être court. Il sonde le futur utilisateur sur son mode de fonctionnement, et pose une question-clé : « Estimez-vous que votre système CRM actuel vous permet d’être au top de votre efficacité commerciale ? ». La réponse est une échelle de valeur, par exemple de 1 à 5, et le répondant doit évidemment préciser sa pensée. On administrera le même questionnaire quelques mois plus tard, bien après que le nouvel outil CRM aura été mis en place. Puis encore 6 mois plus tard, et ainsi de suite.

Un répondant peut se tromper sur son évaluation de l’impact d’un outil sur ses performances, mais pour peu que vous puissiez interroger plusieurs personnes, vous arriverez vite à une tendance générale. Et si le résultat est un désaccord profond entre les différents protagonistes, c’est aussi une information intéressante. On observe cependant que les répondants prennent l’exercice très au sérieux, d’autant qu’ils savent que la même question leur sera posée régulièrement. On obtient généralement une forme d’homogénéité des réponses.

Ainsi, si vous appliquez l’échelle de valeur de la question-clé au CA produit par votre commercial, vous disposez d’un indice d’efficacité CRM que vous pourrez suivre dans le temps.

Quels sont les facteurs d’échec du projet ?

La mini-étude décrite ci-dessus produit en outre un certain nombre d’effets positifs. Lors de sa première administration, avant que le projet de mise en œuvre ne débute, elle amène chacun à se livrer davantage, à expliquer ce qu’il attend. Pendant le projet, les futurs utilisateurs seront plus attentifs à vos efforts – un tel questionnaire est aussi une façon pour vous de leur dire que vous vous souciez de leur réussite professionnelle. A contrario, il vous engage – vous annoncez officiellement, dès le début, que ce projet est une priorité pour l’entreprise, et que vous y consacrerez personnellement une part significative de votre temps.

Car votre implication personnelle est essentielle. Dans la plupart des cas, on constate qu’un projet CRM est une réussite… quand il n’échoue pas. Entendez par là que l’apport d’un tel outil sera probablement perçu de façon sensible par les utilisateurs, voire par vos clients et partenaires . Dès lors, le seul cas de figure d’un ROI négatif est l’échec du projet de mise en œuvre. La chose s’est déjà vue. Les contextes à risque sont peu nombreux et faciles à identifier en trois questions :

· L’outil a-t-il été choisi collégialement ?  Un logiciel imposé par la Direction est la cause d’échec la plus fréquente. Excédé par les plaintes de son équipe, l’autocrate qui dirige l’entreprise, éventuellement soutenu par un Père Joseph de circonstance, a vu une publicité dans un journal. On lui a fait une démo et il a pris sa décision en son âme et conscience, sans rentrer dans le détail des besoins réels (présents et à venir), ni de l’implication des futurs utilisateurs dans le choix de l’outil (« On ne va pas monter une usine à gaz, non plus ! »). Le projet n’est pas forcément condamné à l’échec mais rien n’est fait pour faciliter les choses : logiciel probablement inadapté, réticence logique des utilisateurs, sentiment général que la Direction considère le CRM comme un mal nécessaire, et non pas comme une source de valorisation de l’entreprise.

· Y a-t-il un chef de projet clairement désigné ? On voit aussi quelques échecs qui ressortent d’une démarche inverse : désireux de ne froisser personne et de mettre en place un système performant, l’entrepreneur se repose entièrement sur son équipe. Il ne choisit pas vraiment un chef de projet, mais plutôt deux ou trois personnes, chacune avec des responsabilités mal définies. Il clame partout que le projet est prioritaire, mais quand on vient l’en entretenir, il a toujours autre chose à faire. Il s’abrite derrière la délégation pour ne prendre aucune décision. Ce type de situation est relativement rare mais elle conduit immanquablement à l’échec du projet – et souvent, en parallèle, à un profond sentiment de frustration des utilisateurs.

· Le périmètre du projet est-il raisonnable ? On peut être un excellent spécialiste dans son domaine, mais n’avoir pas toujours une vision réaliste de son marché ou du management. De même qu’il nous est arrivé de lire des business plans promettant la constitution d’un empire industriel en moins de trois ans – avec une mise de départ modeste, sinon il n’y aurait pas de challenge -, de même avons-nous rencontré de jeunes créateurs, par ailleurs excellents dans leur métier, qui nous expliquaient leur échec à synthétiser dans un grand tout logiciel leur facturation, les campagnes emailing et SMS, la relance des impayés, la synchronisation Outlook et iPhone, le SAV, les commissions des vendeurs, l’agenda partagé nomade, les appels de prospection, la gestion des séminaires, les tableaux de reporting d’activité, les commandes de fichiers et les adresse opt in en provenance du site web.

Si vous avez répondu trois fois OUI aux questions précédentes, il est peu probable que votre projet échoue. Rendez-vous dans un mois pour la suite – une série de questions sur la méthodologie de mise en œuvre, les règles d’utilisation et d’exploitation.

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