Par Alain Fernandez (contributeur exclusif) – Consultant indépendant
Vous vous souvenez de la protestation conduite par les « pigeons », ces entrepreneurs sérieusement remontés contre le gouvernement ? En substance, ils avaient élevé le ton pour dénoncer le taux d’imposition des plus values générées par la vente de leur entreprise. Au cours de la « fronde », j’ai croisé quelques jeunes entrepreneurs eux aussi un poil énervés par les nouvelles mesures. J’étais surpris qu’ils se sentent concernés, ils venaient à peine de commencer à monter leur projet. J’ai ensuite compris que telle la Perrette de la fable, ils calculaient déjà les supposées plus values mirifiques qui seraient générées par la cession de leur entreprise, avant même d’avoir lancé la première affaire réellement profitable ! Nourris des sagas des entrepreneurs mythiques contées à l’envi par les fabricants de légende, ils se voyaient courtisés par les investisseurs envieux de racheter leur entreprise à peine naissante.
Laissons de côté les protestations des entrepreneurs dont la légitimité a déjà été bien débattue et intéressons-nous à ces quelques jeunes créateurs bien trop pressés de faire fortune. Ils sont révélateurs d’un phénomène pernicieux bien plus général qu’il n’y paraît. Impatients de décrocher le gros lot, ils n’ont qu’une idée en tête : réussir sans attendre, revendre leur entreprise et engranger de rapides plus-values. Trois ans maximum semble la durée le plus souvent citée pour réussir.
Bien évidemment, avec une telle prétention, il ne sera pas facile (euphémisme !) de prendre le temps et de trouver l’énergie pour poser les indispensables fondations d’une activité durable. On tient peut-être là l’une des explications à la statistique toujours impressionnante des défaillances de jeunes entreprises. Le phénomène n’est pas nouveau, loin s’en faut, mais avec les difficultés croissantes de décrocher un emploi salarié stable, l’entrepreneuriat attire toujours plus de candides.
Faites gaffe à l’endettement…
Trop impatients de s’enrichir, ces jeunes entrepreneurs ne voient pas les chausse-trapes de l’endettement. C’est bien là le piège le plus courant. Trop confiants dans l’avenir, ils déploient d’ambitieux business plans, et cherchent à contracter des prêts tous azimuts. Ils sont intimement persuadés de les rembourser rubis sur l’ongle dès que la réussite sera au tournant, pas de doute à ce sujet. Les banques sont réticentes ? Eh bien, sollicitons la famille ou les amis quitte à les placer dans une situation difficile ! En dernier recours, on se repliera chez les prêteurs professionnels, usuriers des temps modernes. Voilà le bon moyen de se dégoûter à vie de l’esprit d’entreprendre.
Pour mémoire, l’entrepreneur raisonnable et averti sait que l’endettement est un boulet qui entrave toutes les initiatives. Il préfère démarrer « petit » et s’autofinancer autant que faire se peut. Il surveille ses fonds propres et accorde toute l’attention disponible à la gestion de sa trésorerie, véritable talon d’Achille de l’entrepreneur, qu’il soit débutant ou chevronné, indépendant ou à la tête d’une multinationale.
… et attention aux vautours et autres faisans…
Enfin, si les entrepreneurs en colère se qualifiaient de « pigeons », les moins malins d’entre eux finiront dans la peau d‘un « dindon » soigneusement farci, comme il se doit pour une volaille. Ils constituent en effet d’excellentes proies pour les « vautours » toujours à l’affût des ambitieux trop crédules. La cupidité est toujours mauvaise conseillère. Pour les « faisans » qui rôdent dans l’univers de la création d’entreprise, ce ne sont que des jobards bons à plumer. L’ambition disproportionnée annihile en effet toute forme de bon sens et de raisonnement rationnel. C’est un fait. Tout flatteur ne vit qu’au dépend de celui qui l’écoute disait le rusé renard au corbeau trop imbu de sa petite personne.
1. On n’entreprend pas pour s’enrichir
L’enrichissement est dans le meilleur des cas la conséquence d’une démarche d’entrepreneuriat bien conduite, ce n’est en aucun cas un but.
2. On entreprend pour aller au bout de son idée
C’est l’occasion d’accomplir son ambition, d’exprimer ce qui nous tient à cœur tout en gagnant son autonomie de décision et d’action.
3. On entreprend pour créer de la valeur
Réussir, c’est être capable d’apporter une « vraie valeur » pour de « vrais clients » prêts à payer un coût suffisant pour assurer la rentabilité de l’entreprise. Le bon entrepreneur surveille ses marges. Il a aussi compris que la course aux aides n’est jamais une solution durable. L’entreprise doit être très rapidement autonome financièrement (voir notamment les déboires de la production avicole intensive en Bretagne depuis la suppression des aides européennes à l’export).
Alain Fernandez – Auteur de 44 Astuces pour démarrer votre Business, Eyrolles 2014
Les bonnes feuilles du livre sur le site de l’Express : http://lentreprise.lexpress.fr/avant-de-se-lancer/7-astuces-a-garder-en-tete-pour-demarrer-son-business_44936.html
La fiche pratique : http://www.piloter.org/asoncompte/astuces-entrepreneur.htm