Par Pascal Houillon (contributeur exclusif) – Fondateur de l’Institut Sage et Président de Sage en France
Récemment, j’ai appris en lisant cet article
du Figaro que cinq grands réseaux bancaires qui sont aussi des banques pour les professionnels et les
professions libérales (Crédit Agricole, Crédit Mutuel, Société Générale, BPCE
et BNP Paribas) ont donné quelques gages supplémentaires aux PME et TPE en
augmentant significativement l’enveloppe destinée aux crédits à moyen et long
terme. Au total, le chiffre annoncé s’élève désormais à près de 100 milliards
d’Euros. Une belle somme ! Mais avant d’en arriver à cette hausse de 65% des
fonds réservés, il a fallu que Bercy tape du poing sur la table.
L’enjeu est pourtant de taille car les trésoreries des
entreprises s’assèchent : -14% en 2009.
Si les dispositions de
de Modernisation de l’Economie (LME) semblent en apparence (et en partie) porter leurs fruits sur les délais de paiement
qui ont effectivement baissé dans certains secteurs (plusieurs ont reçu une
dérogation… jusqu’en 2012), il y a aussi des mécanismes pervers et des dérives
qui viennent contourner le dispositif comme on peut le lire dans ce dossier
de l’Usine Nouvelle. Jeu sur les dates, recours à des filiales qui ne sont pas
soumises à cette même loi (!),création de faux litige pour bloquer le paiement
et bien sûr pression sur les prix. Or que se
passe-t-il quand les PME manquent d’oxygène ? Elles sont imbriquées les
unes dans les autres : clients, fournisseurs, partenaires… c’est donc tout l’écosystème qui
pâtit par capillarité des difficultés de trésorerie d’une PME. Celle qui a du
mal à faire rentrer l’argent aura tendance à retarder les sorties. Et dans ce
jeu, les entreprises plus grandes exercent une pression bien plus forte, comme
client ou donneur d’ordre, par le simple poids qu’elles représentent.
De plus, l’assèchement de la trésorerie des PME est un
problème à double gâchette : quand l’activité se porte mal il est
difficile d’investir pour accélérer l’activité (matériel productif, formation,
R&D, marketing et communication), et quand elle est prête à repartir le
fonds de roulement est trop faible pour reconstituer des stocks, aussi la
croissance en est freinée. Or faire grossir le volume global de fonds n’est pas
suffisant pour donner un peu de champs aux PME si les conditions d’obtention se
durcissent par ailleurs.
Aussi, il faudra être attentif à ce que cette annonce ne
soit pas un compromis de façade qui donne le sentiment que davantage d’argent
est débloqué pour huiler les rouages de l’économie, alors que la burette reste
bien sagement fermée sur l’étagère. Il n’est pas certain que la loi soit
toujours nécessaire, car l’intervention des pouvoirs publics pour rappeler à
l’ordre peut suffire, mais comprenons-nous bien : agir de manière
responsable c’est aujourd’hui faciliter l’accès au crédit pour les PME car nous
avons tous à y gagner, des PME aux sociétés plus conséquentes, et jusqu’aux
organismes financiers !
Le médiateur du crédit a déjà beaucoup fait, mais les
questions de crédits de trésorerie sont les plus difficiles à résoudre car
perçues comme une transfusion. Or il s’agit bel et bien du ballon d’oxygène qui permet de
poursuivre l’effort. Je le vois à travers le pragmatisme de nos clients chez
Sage, qui se montrent de plus en plus attentifs aux outils de pilotage et de
gestion de trésorerie en raison de difficultés sur ce point. Elles cherchent où
se trouve l’argent en interne, et parfois il y a de vrais gisements à
exploiter, mais leurs réserves propres ne sont pas inépuisables.
Je suivrai donc avec
attention l’évolution des encours moyens et de la trésorerie de nos
entreprises, une amélioration sera sans doute, en plus du confort de gestion
apporté, le signe que chacun aura joué son rôle.