« Petite chronique boursière  » : Et donc, cette performance … ?

Vincent_colot Par Vincent Colot (chroniqueur exclusif) – Analyste financier

En Bourse, comme ailleurs, il faut parfois se sortir de l’immédiateté et prendre le temps de la réflexion. En particulier, celui qui investit depuis une assez longue période en actions individuelles a bien raison de vouloir faire le point sur sa performance : « Finalement, quelle est la pertinence des décisions d’achat et de vente que je prends ? ».

Soyez d’abord conscient que pour aborder un jour ce sujet dans de bonnes conditions, vous devez garder tous les relevés de vos opérations. N’oubliez pas les frais divers et les impôts. Le moyen le plus commode est de vous constituer une feuille de calcul dans un tableur informatisé de type « excel ». Attention également à la façon dont vous constituez votre portefeuille : si vous ajoutez des actions régulièrement (vous grossissez alors le montant de vos fonds investis), vous modifiez à chaque fois la base de comparaison d’une période à l’autre. En supposant que vous consacrez à chaque achat une somme équivalente, le plus simple est sans doute de calculer votre performance (sur une base annualisée) pour chaque action depuis le moment où vous l’avez achetée jusqu’au moment où vous l’avez vendue (ou jusqu’au moment du calcul de performance si vous la détenez toujours) ; et ensuite, de faire la moyenne de toutes vos actions.

Vous obtenez finalement votre performance : en moyenne, sur la période considérée, votre stratégie vous rapporte 4, 7 ou 11% par an, tous frais déduits. (Restons à ce stade optimistes et décrétons que vous ne perdez rien !).

Est-ce une « bonne » performance ?

Il y a deux façons de considérer un tel chiffre : soit de façon absolue, soit de façon relative.

De façon absolue, vous devez rapprocher votre performance de votre objectif initial. Etant donné le risque que vous prenez en investissant en actions individuelles, vous aviez sans doute exigé (vis-à-vis de vous-même) un rendement minimum de cet exercice. A titre personnel, je fixerais ce dernier à au moins 7%. A cette aune, 7% est OK, 11% est très bon et 4% est un ratage.

De façon relative, vous pouvez comparer votre performance de l’évolution du marché boursier sur la période. Etant donné les exagérations fréquentes de la Bourse à court terme (à la hausse comme à la baisse), une période assez longue est nécessaire pour que cette comparaison ait objectivement du sens. Prenons ici, à titre d’exemple, une période de 14 ans allant de 1998 à 2011. Quel indice allez-vous considérer ? Tout dépend de votre terrain de chasse, tel qu’initialement conçu. Il se peut très bien que vous ayez principalement négocié des actions françaises sur la période mais que vous ayez initialement envisagé d’investir à travers toute l’Europe. Si rien ne vous a concrètement empêché de faire vos emplettes en Allemagne, en Italie ou au Royaume-Uni, vous devez opter pour un indice européen. Très bien mais lequel ? Si le choix de vos investissements a été effectué sans égard pour la taille des entreprises, un indice qui favoriserait les grandes capitalisations (leur accordant plus de poids dans son calcul) n’est pas approprié. Vous devez rechercher un indice dit « equally weighted », à savoir un indice considérant chaque action sur un pied d’égalité avec chaque autre. Un bon choix s’avère dès lors être l’indice STOXX 600 Europe Equal Weight reprenant 600 entreprises de toutes tailles de 18 pays européens. Vous pouvez le retrouver sur le site www.stoxx.com. Quel est le constat ? De 1998 à 2011, la performance annuelle moyenne de cet indice (en rendement net, c-à-d en tenant compte des dividendes impôts locaux déduits) est de 5% en euros.

Donc, réaliser un minimum de 7% par an lorsque la Bourse a produit un rendement de 5% n’était assurément pas chose aisée. La raison principale d’un éventuel échec serait sans doute d’être entré en Bourse (en 1998) à un moment où la Bourse était assez chère. La valorisation boursière de départ est effectivement un paramètre fondamental à prendre en compte pour mettre toutes les chances de votre côté. Mais, par ailleurs, lorsqu’on examine l’évolution boursière sur la période, le dessin qui émerge ressemble à des montagnes russes : il était donc possible de se renforcer et de se délester à des moments bien choisis. D’accord : c’est plus vite dit que fait ! Mais tout le défi est (aussi) là.

Enfin, pour que votre diagnostic soit complet, vous devriez également tenir compte du risque finalement pris. Sans entrer ici dans des considérations techniques, tentez de vous figurer la volatilité de votre performance sur la période et de la comparer avec celle de votre indice de référence. Si votre performance a été réalisée sans brisques à-coups au cours de la période 1998-2011, alors vous pouvez être particulièrement fier de vous !

Une fois tous ces renseignements glanés, il ne vous reste plus qu’à décider de l’inflexion à apporter ou non à votre stratégie. Et si, par malheur, la déception, l’impuissance et le découragement sont au rendez-vous, optez pour la culture du chou-rave. C’est excellent.      

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