Le conducteur du bus connecté

Gilles MartinPar Gilles Martin (chroniqueur exclusif) – Président du cabinet de conseil en stratégie et management PMP et gérant de Youmeo un innovation Lab et conseil en innovation

Rencontre cette semaine avec un CEO d’une Business Unit d’un grand Groupe multinational. Il est accompagné de son Directeur Marketing et Ventes et de son Directeur des Ressources Humaines. Leur sujet : Développer les activités dans le Software, passer d’un positionnement Produit à un positionnement Solutions.

De nombreuses entreprises sont confrontées à ce mouvement stratégique : les produits deviennent des objets intelligents, et sont intégrés à des systèmes d’informations qui changent profondément l’organisation et les process des entreprises.

Ces systèmes ont des composants physiques (mécaniques, électriques), des composants intelligents (capteurs, commandes, logiciels, systèmes d’exploitation), et des composants de connectivité (antennes, réseaux de communication entre le produit et le cloud).

Ce sont donc de nouvelles infrastructures qui se mettent en place, et redessinent toutes les fonctions de l’entreprise. Cela change aussi complètement la façon dont les entreprises interagissent avec leurs clients. Avec ces systèmes, le lien avec le client est continu. Alors qu’auparavant l’information sur le client était surtout obtenue au moment de la transaction commerciale, et que l’on avait moins d’informations pendant que le client utilisait le produit, la situation avec les objets intelligents est transformée : du fait de cette connectivité, il est possible de connaître la valeur que le client tire du produit en permanence. Avec ces informations sur l’utilisation, on  obtient une nouvelle segmentation des clients selon les usages et les modes de consommation ; De quoi fournir de nouvelles perspectives pour les Directions du Marketing., et créer des offres et services sur mesure.

Mais la fonction Ressources Humaines est aussi concernée. Le fabricant de produits intelligents connectés devient une nouvelle entreprise, entre l’entreprise industrielle et l’entreprise informatique. Les formes de travail se transforment, la culture change, le métissage des compétences transforme l’entreprise. Pour se développer, il faut trouver les bons profils et les experts en ingénierie informatique, très demandés. Il faut aussi embaucher (ou trouver chez les partenaires) les scientifiques qui pourront construire et exploiter les outils analytiques automatisés permettant de traduire les données en actions.

Ce CEO avait donc bien fait d’amener ce Directeur Marketing et ce Directeur des Ressources Humaines.

Mais quel rapport avec le conducteur de bus évoqué par le titre de cette chronique ?

La conversation passe à une question du CEO : Et si on créait une Division dédiée au « Software » ? En y rapatriant en Central  les ressources clés : forces de vente dédiées, gestion RH, développement, etc.

Et la question : Faut-il créer le modèle et la stratégie de cette nouvelle B.U d’abord, puis choisir le leader pour la diriger (probablement quelqu’un l’extérieur, mais pas obligatoirement). Ou bien faut-il d’abord choisir le leader et lui confier le développement de la stratégie, des process, et de l’organisation ?

Jim Collns, auteur du best-seller «  Good to Great » avait observé ces entreprises qui étaient « excellentes » et pas seulement « good », ne posaient pas en premier la question du « Where ? » ( Où l’entreprise va-t-elle aller ?), mais du « Who ? » (Qui est le leader ?). Et il utilise cette métaphore du bus : choisissez d’abord le conducteur du bus, et qui va occuper les principaux sièges du bus. Si vous n’avez pas le conducteur, laissez son siège vide, et prenez le job en attendant. Et mettez les bonnes personnes dans les sièges clés. C’est la première étape de la transformation : le casting.

La deuxième étape : laissez les profils non adaptés descendre du bus. Ne gardez à bord que les profils adéquats.

La troisième étape : pour toutes les questions qui vont se poser, les décisions à prendre, les choix à faire, poser d’abord la question « Qui ? ».

Ainsi, selon  Jim Collins, cette discipline ne vous permettra pas seulement d’aller vers la bonne direction, mais surtout d’aller le plus loin possible. Car dans ces transformations, tenir la distance est aussi important que de choisir le cap. Car dans une stratégie, ce qui compte c’est l’exécution. On attribue à Thomas Edisson la citation suivante : «  Ideas without execution are hallucinations » (les idées sans exécution sont des hallucinations). Et l’exécution, ce sont les hommes et les femmes de l’entreprise qui vont la faire.

De bons conducteurs de bus, les sièges-clés occupés par les bonnes personnes : voilà de quoi garantir l’exécution sans hallucination.

A l’heure où l’on parle de transformation digitale, de révolution des objets connectés, se rappeler ce bon sens de Jim Collins est salutaire.

Alors, qui va conduire votre bus ? Connectez-le bien !

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