« Petite chronique boursière » : Et maintenant, quoi (II) ?

Vincent_colot Par Vincent Colot (chroniqueur exclusif) – Analyste financier

Ceux qui ont déjà leurs pensées exclusivement centrées sur la dinde aux marrons ou sur la buche au chocolat ne peuvent s’en souvenir. Au début mai 2009, en pleins remous économico-boursiers, je tentais de faire un premier point sur la situation des marchés d’actions dans la crise.

Tout en attirant l’attention sur le fait que le pire de la crise semblait derrière nous, j’indiquais également que les Bourses occidentales ne m’apparaissaient pas spécialement bon marché. Depuis lors, elles ont pourtant continué à regagner progressivement du terrain.

Comment l’expliquer ? Après un choc aussi brutal que celui de la crise financière de 2008, il est tout à fait normal que les investisseurs prennent un certain temps pour recouvrer leur sang-froid. Au fur et à mesure où les risques systémiques (effondrement du système capitaliste, pour faire court) faiblissaient, ces investisseurs ont repris confiance et ont repoussé les cours des actions à la hausse. D’autant plus que les perspectives économiques, d’abord très sombres, s’amélioraient timidement mais sûrement. Résultat : aujourd’hui, en décembre 2010, on est revenu à un niveau du CAC 40 équivalant à celui d’avant le dévissage de septembre 2008.

Pour caractériser l’état actuel de l’économie occidentale, certains parlent d’une « nouvelle normalité » d’après crise : croissance économique et inflation assez faibles avec un taux de chômage élevé persistant. Je suis d’accord avec cette analyse : le système doit encore se purger d’un excès de dettes (privées et publiques) avant de pouvoir repartir sur des bases assainies. Cela prendra du temps.

Une telle situation atone implique-t-elle nécessairement des rendements boursiers ultérieurs décevants pour les investisseurs ?


Non, en règle générale, ainsi que l’explique très clairement le renommé Professeur de finance américain Kenneth French : lorsque les problèmes sont connus, les cours des actions se sont ajustés en conséquence aux difficultés à venir ; pour un niveau de risque supérieur à assumer, les investisseurs seraient naturellement en droit d’attendre des rendements en moyenne plus élevés. Donc, à partir d’une situation économique difficile, les rendements boursiers devraient être plutôt meilleurs qu’en temps de non crise.

D’ailleurs, il s’agit de relativiser l’impact de la croissance économique sur les résultats des entreprises : une récente étude menée par les spécialistes de chez Barra indique en effet, sur une période de 40 ans (1969-2009) et pour un ensemble de 12 pays développés, une progression réelle (hors inflation) moyenne des bénéfices par action de seulement … 0,1% par an (peanuts !!), alors même que la croissance économique réelle était en moyenne de 2,4% par an. La quasi-totalité du rendement boursier qui a été réalisé sur la période proviendrait donc de la perception qu’ont eue les investisseurs des marchés. Considérés structurellement de moins en moins risqués, ces marchés ont progressé à la hausse sur un rythme (hors dividende) moyen réel de 2% par an (1,7% pour la France).

Tout serait-il donc pour le mieux dans le pire des mondes possible ?

Attention, tout de même ! Pour deux raisons :

1. Le raisonnement de Kenneth French se tient parfaitement en situation de marchés efficients. Si le rendement est fonction du seul risque, alors à situation plus risquée, rendement généralement plus élevé. Mais, aujourd’hui, je ne suis pas totalement convaincu que les niveaux boursiers tiennent correctement compte de la gravité de la crise que nous avons traversée et de ses stigmates. Et une partie du relatif optimisme actuel provient, je le crois/je le crains, des perspectives de croissance (que je juge) exagérément favorables des pays émergents pour la santé bénéficiaire des entreprises occidentales (qui y exportent ou qui produisent et vendent sur place).

2. Au-delà d’une situation économique morose, je n’écarterais pas si vite le risque d’une rechute des économies occidentales dans la récession : un tel « double dip » provoquerait un sérieux coup de froid sur les Bourses et, après une nouvelle panique, paralyserait à coup sûr pour longtemps des investisseurs qui ressentent encore, comme un coup d’épée dans leur chair, la chute de 2008.

Les Bourses seraient donc plutôt toujours trop chères, à mon goût … Soyez très exigeants quant à votre marge de sécurité (différentiel entre la valeur estimée d’une action et son prix) si vous achetez en Bourse.

Allons, quoi qu’il en soit, il n’y a rien de bien grave ! Il n’y a pas mort d’hommes (à l’exception d’un des fils Madoff, je vous le concède) : il y a même plutôt la naissance d’un Divin Enfant … Joyeux Noël à tous et excellente année 2011 !

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