Par Antoine Teillet (chroniqueur exclusif) – Journaliste spécialisé grandes écoles
Ceux qui suivent l’actualité de l’enseignement supérieur n’auront pas manqué le passage de la loi relative aux « Libertés et Responsabilités des Universités » dite aussi loi LRU ou loi « Pécresse » qui permet notamment aux universités de créer des fondations universitaires et partenariales (article 28).
Ce passage est d’importance. Il signifie en effet pour les universités une nouvelle possibilité d’augmenter leurs revenus. En allant chercher l’argent ailleurs que dans les circuits habituels. Face à des pouvoirs publics aux moyens désormais limités, la solution passe par les entreprises ou les donateurs privés. Les grandes écoles ont déjà une large avance dans le domaine puisque voilà déjà quelques années –voire quelques décennies– qu’elles ont déployé de gros efforts en direction des entreprises.
Je pense par exemple à l’Insead qui a récemment bouclé une levée de fonds de 194 millions d’euros. Je pense à HEC dont la Fondation a été lancée dans les années 70 et rénovée en 1991 et qui compte bien aller chercher 100 millions d’euros de revenus privés d’ici 2010. Je pense à Polytechnique qui a annoncé ces jours-ci une levée de fonds de 25 millions d’euros, l’école ayant déjà collecté de manière officieuse une douzaine de millions l’an passé. Une somme très importante en un laps de temps si court.
Ce genre de démarche ne signifie en rien une perte d’indépendance pour ces établissements. Aujourd’hui, les institutions d’enseignement supérieur sont à l’écoute des entreprises, c’est un fait. Elles tiennent compte de leurs besoins, elles adaptent leurs formations, mais prouvent que de telles relations de proximité sont possibles sans s’inféoder au grand capitalisme. Si la sphère économique est souvent représentée dans les instances des grandes écoles, si les associations de diplômés de ces institutions y sont très influentes, ces établissements proclament tous leur volonté de rester indépendants et y arrivent de manière générale. Il est de toute façon évident qu’elles seraient mortes ni elles ne faisaient que se placer à la remorque de quelques grands groupes. Si HEC ne faisait que suivre sans aucune réflexion les besoins du CAC 40, serait-elle N°1 en Europe depuis trois ans selon les classements du Financial Times ?
Et pour terminer cette petite chronique, quelques chiffres.
• Depuis l’été 2003, la loi Ailhagon autorise la déduction de 66 % du montant du don pour les particuliers, déduction plafonnée à 20% du revenu imposable, au lieu auparavant de 50% et d’une limite de 10%. Avec possibilité de reporter l’excédent du don sur cinq ans. En pratique, si un particulier verse un million d’euros à HEC, il pourra déduire de ses impôts 660 000 euros et si le plafond de revenu imposable est dépassé, répartir cette réduction sur cinq ans… Pour les entreprises, les déductions s’élèvent à 60 % plafonnées à 5 pour mille du chiffre d’affaires –au lieu de 2,25 à 3,25 pour mille par le passé.
• Et pour ceux qui trouveraient ces chiffres astronomiques voire indécents, sachez que l’université de Harvard (Etats-Unis) avait accumulé 35 milliards de dollars de dotation financière au 30 juin 2007. L’université de Cambridge (Royaume-Uni) s’est pour sa part lancée dans une campagne de collecte de 1,4 milliard d’euros.
En Légende : L’université de Harvard