Par Philippe Cazaban (chroniqueur exclusif) – Trouveur de solutions pragmatiques
La vie de l’entrepreneur n’est pas simple et chacun sait qu’il ou elle doit posséder toutes les qualités, être un superman ou une superwoman, avoir la réponse à toutes les questions, encaisser tous les coups du sort et être plein de ressort.
Sans aucune prétention, permettez-moi de vous brosser en quelques mots une expérience personnelle toute récente qui illustre seulement les nécessaires patience et persévérance de celui qui ose de se lancer dans un projet entrepreneurial.
Tout à commencer il y a juste deux ans. Avec mon associé, nous réfléchissons au lancement d’un nouveau projet et rapidement une idée intéressante est arrêtée. Après deux ou trois mois pour mettre au point le concept, nous rencontrons un premier prospect (quelqu’un de nos connaissances, c’est plus facile dans ces circonstances) pour affiner l’approche des clients. La discussion est fort intéressante et notre rencontre se termine par “Allez les gars, bouclez votre affaire, revenez me voir et on y va !” Chouette, encourageant et prometteur. Encore un mois pour fignoler notre proposition et nous reprenons contact avec le prospect pour apprendre que notre contact (le patron) s’est proprement fait virer la semaine précédente par son Conseil d’Administration (on est dans le monde associatif) !
Nous voilà obliger d’attendre que la nouvelle équipe dirigeante se mette en place et prenne ses marques. Nous recommençons notre approche, on nous renvoie d’un interlocuteur à l’autre (du Président au Secrétaire, du Secrétaire au Chargé de mission, etc.). Chaque interlocuteur est très intéressé, mais il ne peut prendre la décision ! Et la “patate chaude” circule pendant hui mois avant que je sois prévenu la veille pour le lendemain que ce serait bien de venir présenter ma proposition au Conseil d’Administration. Nous avions failli renoncer… Un agenda bousculé et un aller / retour à Paris pour vingt minutes d’intervention (c’était la fin du Conseil, ils étaient tous pressés de partir !). Bon, ça valait le coup puisque la décision d’accepter notre proposition est immédiatement prise.
Attaquons donc la mise en œuvre. Le premier fournisseur identifié, qui avait adhérer au projet, se révèle incapable de répondre à notre besoin. Le partenaire technique, persuadé que le projet a capoté, a pris d’autres engagements… Le temps de rebondir, encore trois mois se sont écoulés. Pour terminer la mise en œuvre, il faut nous synchroniser avec un prestataire du client et faire intervenir un dernier fournisseur (grande société internationale). La synchronisation avec le prestataire du client est impossible : il est aux abonnés absents. Encore deux mois perdus pour trouver une solution de contournement, d’ailleurs partiellement satisfaisante. Quant au dernier fournisseur, il nous “plante” dans sa paperasserie interne, nous fait perdre une semaine qui se transforme en un mois car alors, c’est notre partenaire technique qui est en congés.
Heureusement, nous avons gardé courage et les premières opérations concrètes liées à ce projet vont voir le jour ce mois-ci. Au bout de deux ans. Dans notre enthousiasme et notre optimisme initial, nous avions envisagé un délai de huit ou neuf mois…
Tout vient à point à qui sait attendre !
Bonne rentrée à tous.

Votre article me pousse à poser une question : Peut-on être un entrepreneur qui réussit sans patience ? J’entends patience dans le sens de ne pas prendre des décisions précipitées, de laisser le temps au temps, de laisser murir certaines choses,…
Merci de vos avis.
Pour la patience, on n’a pas le choix, on dépend tellement de gens, de paramètres, de délais en tous genres…
Pour ce qui concerne les décisions précipitées, évidemment, présentées comme ça, il vaut mieux les éviter. En revanche, certaines décisions doivent être prises rapidement.
Parfois, l’audace qui paye se tente plus dans l’instant que dans la réflexion.
Un entrepreneur sans patience est quelque peu insupportable pour son entourage ! Car, comme le dit Armel, « on n’a pas le choix ».
On ne peut pas prendre des décisions précipitées car elles présentent des risques majeurs pour le projet entrepreneurial. C’est un peu du pile ou face…
En revanche, une autre des qualités indispensables au superman (ou la superwoman) entrepreneur, c’est effectivement de savoir se décider rapidement quand cela est nécessaire. Certaines utilisent même leur fameuse intuition…
Et puis, la personnalité de chacun intervient énormément dans la manière de décider et dans la prise de risque.
On est tributaire de tant de procrastination (un mot plus fort que tergiversation) de la part de nombreux partis que quelqu’un (l’entrepreneur, puisqu’il a le plus à perdre) doit forcer le dynamisme dans le projet en incitant ces partis à réagir avec rapidité. Il semblerait en lisant votre récit que ce dynamisme manquait un peu dans votre organisation.
Il est certain que la rapidité d’action, sans ignorer la nécessité de bien réfléchir au problème, sont des éléments cruciaux dans l’accomplissement de projets quel qu’ils soient. Mais dans ce cas précis où tant de gens sont, en groupe ou individuellement les « décision makers », la diplomatie et la patience sont autant de précieux éléments qu’il faut rajouter aux premiers… bravo d’avoir autant persévéré ; ce qui vous a permis d’obtenir le contrat et de l’avoir mené jusqu’au bout avec succès. Mais ces gens vous attribueront-ils de nouveau le contrat si besoin est ? Vont-ils vous rendre coupable de leur propre inertie ? W
Ce n’est jamais simple la vie d’entrepreneur, mais la chapeau !