Par Vincent Colot(chroniqueur exclusif) – Analyste financier
Je dois déjà l’avoir souligné : en Bourse, plus que dans tout autre domaine, vous devez vous méfier des évidences.
Ainsi, que disaient la majorité des experts en ce début d’année 2008 ? D’abord, en raison de la crise des « subprimes », mieux vaut investir en Europe qu’aux Etats-Unis. Malheureusement, la baisse des Bourses européennes n’est, à ce jour, pas moins marquée que celle de New York. Ensuite, les pays émergents seront peu touchés par la crise car leurs économies sont prétendument « découplées » des économies matures. En fait, les Bourses des pays émergents ont également plongé. Et, enfin, la hausse des prix des matières premières n’est pas prête de s’arrêter. La réalité a été que la crise économique a fait éclater cette bulle avec, notamment, un baril de pétrole à un prix nettement plus bas qu’en début d’année.
D’autres évidences dont il faut vous méfier ? Assurément !
Il est une pratique largement consensuelle chez les investisseurs, institutionnels comme privés. Selon la position de l’économie au sein de son cycle, il est recommandé d’investir dans tel secteur plutôt que dans tel autre : cette rotation sectorielle, si elle est correctement appliquée, est censée apporter quelques points de performance supplémentaires.
Des chercheurs américains ont tenté d’y voir plus clair en confrontant la théorie avec la réalité. Ils ont d’abord dressé la liste des différents secteurs dans lesquels investir « conventionnellement » aux différentes phases d’un cycle. La voici :
Par Vincent Colot(chroniqueur exclusif) – Analyste financier
Il est rarement facile d’interpréter les mouvements de la Bourse. Même si les journaux regorgent quotidiennement d’explications sur le pourquoi des soubresauts des indices ou de telle ou telle action, l’exercice reste périlleux et cela pour une très bonne raison : le marché est une entité intangible dont on ne peut donc pas cerner les motivations à coup sûr. On ne peut pas interviewer Mister Market (surnom que Warren Buffett donne à la Bourse).
A cet égard, aux Etats-Unis, la période boursière qui va du 15 septembre à l’élection présidentielle est très intéressante.
Le 15 septembre 2008, c’est la faillite de la prestigieuse banque d’affaires Lehman Brothers. Tout à coup, la crise financière liée à la crise immobilière des subprimes, déjà présente depuis de longs mois, prend une nouvelle ampleur : et si le système financier international venait subitement à s’effondrer ? Cet épisode dramatique marque, simultanément, le début de l’inexorable montée dans les sondages de Barack Obama, tandis que John McCain s’embourbe. Et, du 15 septembre au 27 octobre, l’indice S&P 500 (reprenant les 500 principales valeurs de la Bourse de New York) baisse de près de 30%.
Voici trois éléments : la crise économico-financière, l’inexorable montée d’Obama dans les sondages et la chute boursière. Comment relier les trois ?
Par Vincent Colot(chroniqueur exclusif) – Analyste financier
Tentons d’y voir un peu plus clair sur les marchés boursiers.
Ce que nous constatons d’emblée, c’est une forte volatilité des cours des actions avec un mouvement net à la baisse.
1. La volatilité est directement liée au climat de grande incertitude qui agite les sphères économique et financière : la Bourse déteste cela et donc, au gré des nouvelles, peut partir tout aussi brusquement que provisoirement à la hausse ou à la baisse. De quoi en tous cas rappeler aux investisseurs que la Bourse est et demeure risquée.
2. Cela ne vous aura pas échappé : la Bourse a lourdement chuté depuis le début de l’année, le CAC 40 abandonnant près de 40% au moment où j’écris ces lignes (mardi 21 octobre). La transformation de la crise immobilière (dite crise des « subprimes ») en provenance des Etats-Unis d’abord en crise financière (avec le point d’inflexion qu’a constitué la chute de Lehman Brothers) et puis en crise économique a contaminé le monde entier. Rien d’étonnant à ce que les bourses européennes, y compris la française, aient trinqué.
Fort bien ! Et maintenant que faire ?
Pour répondre à cette question, il faut s’en poser une autre, fondamentale : « Sommes-nous partis pour que l’actuelle menace de récession se change en réelle dépression économique de longue durée, à l’instar de ce que les Etats-Unis ont connu dans les années 1930 ou de ce que le Japon a traversé dans les années 1990 ? ».
La réponse à cette question détermine en fait ce que doit faire l’investisseur.
Par Vincent Colot(chroniqueur exclusif) – Analyste financier
Il avait 95 ans. Sir John Templeton, un des plus grands investisseurs du XXe siècle et un grand philanthrope, nous a donc récemment quittés. Tout investisseur, amateur ou confirmé, devrait lire ou relire de temps à autre les enseignements de cet homme, auteur d’une maxime devenue célèbre : « Les marchés haussiers naissent sur le pessimisme, croissent sur le scepticisme, mûrissent sur l’optimisme et meurent sur l’euphorie ». Ayant par exemple investi au Japon durant les années 1960, à une époque où personne n’y croyait, il s’en est retiré avant l’éclatement de la bulle de 1989. En 2003, il s’était inquiété de l’envolée des prix de l’immobilier, se demandant quelle serait la réaction des gouvernements si ceux-ci devaient subitement baisser de 50% … (Sans commentaire !). Sachez encore qu’en 40 ans d’investissement, Templeton a battu l’indice mondial de la Bourse d’une moyenne de 3% par an. Ce qui est loin d’être négligeable, surtout si l’on prend en compte le fait que cette performance a été réalisée avec une volatilité moindre que celle du marché.
Imprégnez-vous de ces 10 règles de base, laissées pour nous en héritage par Sir John.
Par Vincent Colot(chroniqueur exclusif) – Analyste financier
En Bourse, la meilleure façon de gagner de l’argent, c’est bien souvent de … ne pas en perdre. Il n’est pas rare, en effet, qu’un investisseur signe une performance honorable sur la majorité de titres détenus en portefeuille mais essuie un revers retentissant sur une ou deux lignes. Au total, il s’estimera tout heureux si son bilan d’ensemble n’est pas négatif.
Pour éviter, autant que possible, ce type de situation, vous avez tout intérêt à dresser rapidement une carte du risque dit d’investissement de toute action qui vous intéresse. Kekseksa ? Il s’agit du risque que vous encourez de voir la valeur d’une action baisser sensiblement, sans grand espoir à court ou à moyen terme d’assister à un relèvement du cours.
Par Vincent Colot(chroniqueur exclusif) – Analyste financier
L’analyse d’une action revêt bien des aspects frustrants. Le malaise principal est que, quelle que soit l’application de l’analyste, il (ou elle) ne pourra jamais tout savoir de l’entreprise étudiée, à la fois parce qu’il (elle) n’est pas dans la tête des dirigeants de cette entreprise et parce qu’il (elle) n’a pas de boule de cristal pour prévoir l’avenir infailliblement (évolution de l’économie mondiale, évolution du secteur d’activité concerné, etc.).
Soit. Cette situation d’information incomplète fait partie du jeu et il faut bien l’accepter. Mais il est une autre frustration que tous les analystes ont un jour rencontrée. Après de longues heures de recherche minutieuse, l’analyse se termine par l’évaluation de l’action, traduction chiffrée des qualités et des défauts de l’entreprise dans une démarche prospective, et là … catastrophe ! : l’action est bien trop chère pour être achetée. Tout ce travail pour rien !!
Est-ce inévitable ? Non ! Voici une petite méthodologie assez rapide (de l’ordre du quart d’heure maximum) qui va vous permettre d’établir une première estimation de la valeur de l’action, sur base de laquelle l’analyste décidera si oui ou non il est utile de poursuivre le travail.
A n’appliquer cependant, et c’est important, qu’aux entreprises qui ont atteint un certain rythme de croisière depuis déjà plusieurs années.
Prenons une entreprise. Par exemple, l’américaine VF Corporation active dans les vêtements et accessoires d’extérieur (Lee, Wrangler, North Face, Kipling, etc). J’avais pris connaissance d’une étude récente vantant la rigueur de gestion de l’entreprise et je connaissais par ailleurs certaines de leurs marques. L’action cotant aux alentours de 80 USD (début septembre 2008), est-ce trop cher ou non ?
Par Vincent Colot(chroniqueur exclusif) – Analyste financier
Et si ce bon docteur Freud venait au secours de la planète Finance ?
Il y a un siècle, il nous apprenait en effet que les émotions et l’inconscient jouent un rôle central dans la façon dont nous intéragissons avec le monde qui nous entoure.
Or, tout investissement implique des décisions en situation d’incertitude et génère donc de l’anxiété. Gérer cette anxiété revient à tendre vers l’ou ou l’autre de ces deux états psychiques : un état dit « dépressif » (D) ou un état dit « paranoïaque-schizoïde » (PS). Dans l’état D, l’investisseur tente d’appréhender la réalité dans ses nuances en comparant le potentiel de gain avec le risque de perte. Mais dans l’état PS, l’investisseur évacue les éléments déplaisants dans son inconscient pour se recentrer exclusivement sur ce qui est positif pour lui. Son jugement devient fantasmatique : le principe de plaisir prend alors le pas sur le principe de réalité. Le fantasme chez l’adulte investisseur remplace ainsi le jeu chez l’enfant. Ne dit-on pas que nous courons toute notre vie après notre enfance ?
Souvent assimilée à un gigantesque casino et, par ailleurs, sujette à des effets de mode à répétition, la Bourse encourage des comportements basés sur un état de type PS. Cela peut intervenir au niveau des individus isolément ou alors au niveau de populations d’investisseurs. Une excitation initiale (pour une nouvelle technologie, pour un changement supposé d’environnement économique), si elle perdure quelque temps, se transforme alors en une euphorie où l’excès de confiance des investisseurs devient la règle. Et lorsque, finalement, la réalité rattrape et démolit le fantasme, le risque qui était tapi dans l’inconscient des investisseurs rejaillit brusquement. Notons que, le plus souvent, aucune nouvelle information n’apparaît pour expliquer cette disruption : auparavant, les investisseurs ne voulaient simplement pas voir les éléments qui auraient pu les soustraire à leurs rêveries. Mais, plutôt que de s’en prendre à eux-mêmes pour leur imprudence, ces investisseurs cherchent inévitablement des boucs-émissaires : les analystes financiers lors de la bulle Internet ou encore les agences de notation dans l’actuelle crise des subprimes.
Merci aux Professeurs Richard Taffler et David Tuckett pour avoir lancé cette nouvelle discipline de la « finance émotionnelle ».
Par Vincent Colot(chroniqueur exclusif) – Analyste financier
Depuis que les gens ne croient plus en Dieu, le problème n’est pas
qu’ils ne croient plus en rien mais qu’ils sont prêts à croire n’importe quoi
… En dehors de tout débat sur la religion ou la laïcité (!), cette maxime de
l’écrivain britannique G.K. Chesterton pourrait également s’appliquer à la
finance. Cela reviendrait à dire : depuis que les petits investisseurs ne
croient plus leurs conseillers financiers, les rumeurs et les martingales de
toutes sortes ont de plus en plus raison de leur sens critique.
C’est clair : le conseiller financier traditionnel (le plus
souvent, le banquier) n’a plus la cote. Il y a 10 ans, il encourageait les
investisseurs à investir dans les télécoms et la haute technologie. Et puis la
bulle spéculative a éclaté avec les dégâts que l’on connaît. Aujourd’hui, il ne
peut que constater le désastre économique et boursier laissé dans le sillage de
la crise des « subprimes », crise qui provient d’abord et avant tout
de l’aveuglement des milieux financiers eux-mêmes. Et il faudrait encore faire
confiance à de tels « experts » ?
Convenons-en : un banquier, qui a généralement plus souvent en
tête l’intérêt de son entreprise que celui de ses clients, n’est pas le
conseiller idéal. Ce qui laisse l’investisseur dans une position inconfortable
et paradoxale. Grâce à l’Internet et à la globalisation de la finance, il n’a
en effet jamais eu autant de liberté pour investir. Mais s’il dispose d’une
palette de possibilités inégalée, il n’a généralement pas les connaissances
nécessaires pour les utiliser à bon escient.
La question se repose donc : à qui l’investisseur, en quête de
boussole, peut-il se fier pour prendre de bonnes décisions ?
Malheureusement, dans le grand capharnaüm informationnel qu’est l’Internet, il
est directement jeté en pâture aux charlatans et escrocs en tous genres. Un peu
comme des malades tombés sous l’influence de dangereux rebouteux. C’est une
conséquence directe du déclin des élites traditionnelles. Au-delà des vitrines diaboliquement
séduisantes de ceux qui promettent des gains faramineux et rapides, se
développent également des sites qui fleurent bon le Web 2.0, très à la mode. En
gros, le principe est le suivant : les investisseurs aident les
investisseurs. So far, so good, serait-on tenté de dire. Mais quel est le
niveau exact de ces investisseurs ? Des investisseurs
« ignorants » deviennent-ils subitement géniaux dès qu’ils se
regroupent ? Certes, certains sites fournissent des indicateurs de
performance de ces « analystes » amateurs. Mais sont-ils suffisamment
fiables que pour servir de base à des décisions d’investissement ? Quelles
ont été les parts de chance et d’expertise dans telle ou telle
performance ? Quant aux forums de discussion spécialisés sur le sujet, il
suffit d’y avoir promené une ou deux fois sa souris pour vite conclure à leur
totale vacuité.
Par Vincent Colot(chroniqueur exclusif) – Analyste financier
La Bourse est un sujet glissant. Parfois on croit savoir quelque chose et on s’aperçoit assez vite que la réalité est différente. En Bourse plus qu’ailleurs, les évidences ne sont que des mirages et les apparences sont toujours trompeuses. La subtilité boursière trouve sans doute son origine pour partie dans l’incertitude de facto de l’environnement économique et pour partie dans le comportement psychologique de millions d’investisseurs qui s’épient et se jaugent. Un peu comme une immense partie de poker avec sa part inaliénable de bluff. Ou encore comme aux échecs : pour gagner, il faut voir plusieurs coups à l’avance.
Pour illustrer la subtilité de la « chose boursière », j’ai choisi 3 sujets dont je vais brosser rapidement les contours avant, peut-être, de les développer à l’occasion de prochaines chroniques.
Par Vincent Colot(chroniqueur exclusif) – Analyste financier
Un des éléments les plus directement accessibles à analyser
lorsqu’un investisseur étudie un dossier d’entreprise (cotée en bourse), c’est
l’évolution récente du chiffre d’affaires. Une entreprise qui aura connu
récemment une forte croissance de son chiffre d’affaires aura toutes les
chances de capter l’intérêt bienveillant de l’investisseur. Après tout, des
ventes en forte croissance démontrent l’existence d’une stratégie gagnante qui
va continuer à créer de la valeur pour l’actionnaire.
D’accord avec cela ?
Vous ne devriez pas !
Les entreprises qui ont connu une forte croissance de leur chiffre
d’affaires sont dangereuses au moins pour deux raisons :
Par Vincent Colot(chroniqueur exclusif) – Analyste financier
Un de mes amis m’a conté une récente mésaventure boursière que je partage avec vous. Monsieur B. a vu un joli gain lui passer sous le nez par la faute d’un ordre avec limite. En déduire qu’il vaut mieux travailler sans limite serait toutefois une erreur.
Monsieur B. aime chercher lui-même de belles opportunités sur les Bourses. Quelques jours avant Noël, ses yeux tombent sur une action cotée sur le New York Stock Exchange (NYSE) et dont le cours a fortement chuté. Il s’agit de la société américaine First Marblehead, une société de taille moyenne qui octroie des prêts aux étudiants pour financer leurs études. En douze mois, le cours de cette action était passé d’un pic de 57 dollars à quelque 11 dollars, la crise des crédits dans le sillage des difficultés liées aux prêts subprimes n’y étant bien entendu pas étrangère. Après une analyse approfondie, Monsieur B. estime que la baisse du cours est disproportionnée par rapport aux risques et que l’action est donc intéressante. Le 21 décembre au matin, il transmet alors à son agence bancaire l’ordre d’acheter 800 actions de cette société. Il fixe également une limite à 12,50 dollars, ce qui signifie que l’ordre ne peut être exécuté que si le prix de l’action est inférieur à ce montant. Compte tenu du décalage horaire entre les Etats-Unis et l’Europe, son ordre peut encore être exécuté le jour-même à Wall Street.
Le 21 décembre, une demi-heure avant l’ouverture de la Bourse de New York, Monsieur B. jette un oeil, sur internet, sur le cours indicatif de l’action en question. Ce cours indicatif a certes augmenté mais est toujours inférieur à la limite qu’il a donnée. Mais à 9h15 heure américaine, soit un quart d’heure avant l’ouverture de la Bourse à New York – il est alors 15h15 en Europe – une news fait l’effet d’une bombe : Goldman Sachs, un des principaux acteurs du secteur financier américain, annonce qu’il va prendre une participation de quelque 20 % dans First Marblehead et est prêt pour cela à payer un prix de 15 dollars par action. De plus, Goldman Sachs semble également prêt à accorder 1 milliard de dollars de crédits à First Marblehead. Cette grande preuve de confiance est accueillie avec un tel enthousiasme par les investisseurs que le cours de First Marblehead atteint 15,29 dollars à l’ouverture de la Bourse. Et dans le courant de la journée, le cours poursuit son ascension pour clôturer à 18,70 dollars. En d’autres termes, le cours a gagné 66 % sur une seule journée !
Pour Monsieur B., cette hausse incroyable du cours est toutefois un cauchemar. Il pensait que, compte tenu de la volatilité considérable de l’action, il avait pris suffisamment de précautions en indiquant une limite correspondant à plus de 10 % du cours de l’action le soir précédent, mais l’annonce inattendue de la confiance de Goldman Sachs en First Marblehaed a rendu sa limite clairement trop faible, tant et si bien qu’il a vu passer un joli gain boursier sous son nez. Pourtant, il reprend subitement espoir car avant l’annonce de Goldman Sachs et juste avant l’ouverture de la Bourse, le cours indicatif de l’action First Marblehead était encore inférieur à 12 dollars. Après tout, peut-être que son intermédiaire financier avait alors déjà exécuté son ordre ? Malheureusement, son espoir se révèle rapidement vain. Sur le NYSE, aucune transaction n’est effectuée avant l’ouverture de la Bourse et les cours communiqués sont purement indicatifs.