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Petite chronique boursière : L’inévitable spéculation liée aux actions individuelles

Par Vincent Colot (chroniqueur exclusif) – Analyste financier

Dans une de ses chroniques récentes, Jay Mooreland du blog “The Emotional Investor” déplorait (une nouvelle fois) le peu de sagacité des “experts” financiers quant à leurs recommandations en actions individuelles. Celui qui aurait suivi les conseils (49 au total) prodigués pour 2018 par ces sur-diplômés, tels que repris dans le prestigieux hebdomadaire américain Barron’s, aurait affiché une performance négative de 11,4% (en dollar). Soit encore moins que la Bourse qui, elle-même, ne s’en sort pas très bien (-4,4% pour le S&P 500).

Et notre blogueur de regretter qu’une mention telle que “Ces conseils ne vous sont donnés qu’à des fins de divertissement. Ne risquez pas vos économies sur cette base” ne soit pas obligatoire pour accompagner ce genre d’article. Ou, à tout le moins, selon lui, la performance passée de ces experts devrait être mentionnée pour que le lecteur-investisseur puisse juger de leur capacité. Je suis naturellement d’accord avec lui : l’attention du lecteur doit être attirée sur le caractère très spéculatif de tels conseils. Car ceux-ci ne s’adressent qu’à ceux qui savent où ils mettent les pieds. Il n’empêche : pleinement conscients des risques (et de leurs propres biais cognitifs) ou pas, ils sont encore nombreux ceux qui aiment “jouer” les actions individuelles. Et on peut parfaitement soutenir l’idée selon laquelle, totalement livrés à eux-mêmes, ils réaliseraient une performance encore inférieure à celle des experts.

Mais, après tout, pourquoi, dans un tel cadre, cette incapacité chronique à battre l’indice est-elle une telle fatalité ?

Petite chronique boursière : Le Quiz 2018

Par Vincent Colot (chroniqueur exclusif) – Analyste financier

Ne cherchez pas à prétendre le contraire : vous attendiez avec impatience ce désormais traditionnel quiz financier de fin d’année afin d’évaluer vos connaissances, à partir de questions formulées sur la base de mes chroniques depuis janvier.

Sans plus attendre, le voici !

1 – Les banques centrales réduisent leurs interventions sur les marchés financiers : les “robinets” à argent bon marché se tarissent. Avec quelle conséquence sur l’année écoulée ?

a/ Une envolée soutenues des cours boursiers après une longue période d’accalmie

b/ Un retour logique de la volatilité et des secousses sur les marchés

c/ Un krach d’une violence inédite sur les marchés émergents (Brésil en tête) avec un risque de contagion aux Bourses occidentales

 

2 – Parmi ces assertions, combien sont exactes ?

a/ Croissance économique = bénéfices en hausse = bonne santé boursière

b/ En Bourse, il est inutile d’être trop sophistiqué : suivre les évidences permet d’éviter les plus gros pièges

c/ Si vous achetez un fonds géré activement (et donc non indicé), les frais supérieurs que vous acquittez sont la contrepartie d’une meilleure performance à attendre.

 

3 – Les jeunes et la finance

a/ Contrairement à une idée reçue, les jeunes maîtrisent assez bien les questions financières, notamment grâce à la pratique des jeux vidéos de simulation

b/ Peu formés à l’école et souvent confrontés à des parents eux-mêmes peu prudents dans la gestion de leur budget, les jeunes sont trop peu conscients des enjeux financiers du quotidien

c/ C’est au travers de la relation avec leurs grands-parents que les jeunes en apprennent suffisamment sur l’argent et sa gestion.

 

4 – Vous avez quelques actions en portefeuille et vous en suivez l’actualité et les cours

a/ Vous ajustez le poids de ces différentes actions en fonction des évolutions de cours, en renforçant celles qui baissent et en allégeant celles qui montent, de façon à garder identique leur répartition

b/ Vous cherchez à comprendre l’origine des évolutions de cours sans perdre de temps de façon à limiter, le cas échéant, les dégâts

c/ Vous attendez un moment propice, même quelques jours plus tard, de façon à exercer votre esprit critique et à consulter plusieurs sources d’informations indépendantes           

 

5 – Comment vous faire une première idée assez rapide de la qualité d’un fonds de placement, par rapport à d’autres fonds ?

a/ En regardant les frais : plus ceux-ci sont faibles et plus la performance à attendre du fonds a des chances d’être bonne

b/ En optant pour des fonds concentrés sur un nombre limité de valeurs, ce qui est la meilleure façon de battre l’indice de référence

c/ En vous basant sur la performance passée mais attention : cette performance passée doit être médiocre pour espérer un effet de rattrapage

 

6 – Ces dernières années, on a vu resurgir une stratégie un peu inhabituelle en matière d’investissement en actions. Laquelle ?

a/ Les actions les moins risquées (les moins volatiles) ont tendance à surperformer les autres et la conjoncture actuelle semble idéale pour en profiter

b/ Idem que le point précédent sauf que la conjoncture actuelle pourrait s’avérer décevante pour celui qui suivrait cette stratégie

c/ Vu que la Bourse est efficiente, au sens où un investisseur ne peut espérer la battre, seules les actions présentant un double profil de croissance supérieure et d’endettement élevé peuvent espérer se démarquer positivement

 

7 – Un individu, gagnant un revenu annuel de 35000 euros à 25 ans, voyant ce salaire progresser de 3% par an et épargnant/investissant chaque année 6% de son salaire avec un rendement annuel moyen (fluctuant d’une année à l’autre) de 6%, finira à 40 ans avec :

a/ Une dette de 26500 euros

b/ Un capital nul

c/ Un capital de 138000 euros

d/ Un capital de 492000 euros     

 

8 – Un “bon” investisseur fait preuve de :

a/ Humilité, sang-froid, optimisme mesuré

b/ Expertise, audace, réactivité

c/ Capacité de recherche de la bonne information, sens de la prévision plus que de l’analyse et patience tant que son objectif financier n’est pas atteint

 

9 – En France, les particuliers investissent finalement assez peu. C’est sans doute parce que :

a/ Ils refusent catégoriquement tout risque qu’il y a à exposer leur épargne durement constituée

b/ Ils sont plutôt indifférents à un “jeu” où il y aurait, selon eux, autant à perdre qu’à gagner

c/ Par peur des procès, leurs intermédiaires financiers ne sont pas suffisamment incités à leur vendre des produits de placement

 

10 – Pour une stratégie en fonds indicés (ETF), quel serait le meilleur choix ?

a/ Un fonds actions mondial reprenant plusieurs milliers d’actions internationales offrant la plus large diversification

b/ Un fonds certes indicé mais également spécialisé sur un secteur d’avenir, maximisant le potentiel de croissance

c/ Un portefeuille sur mesure de fonds indicés comprenant des actifs, à la fois bon marché ou pas trop chers et faiblement corrélés entre eux de façon à réduire la volatilité

 

Vous êtes arrivé(e) au bout ? Bravo !

Passons aux réponses :

Petite chronique boursière : Prendre tous les risques pour gagner plus ?

Par Vincent Colot (chroniqueur exclusif) – Analyste financier

Je me suis souvenu cette semaine de ce qu’avait dit, à l’université au début des années 90, notre professeur de finance : “La science financière est encore jeune mais s’il y a une chose qui ne sera jamais remise en question, c’est bien la relation positive entre le risque et le rendement”.

Traduction : pour espérer plus de rendement, il s’agit de prendre plus de risque.

Cette assertion, un rien péremptoire (mais qui serait sans doute reprise à son compte par celui qui l’a remplacé à son poste), m’est revenue à la mémoire à l’occasion de la publication d’un graphique assez sidérant. 

Graphe
Que montre ce graphique ? Eh bien, il nous dit que sur les 20 dernières années, un fonds investi en obligations américaines de longue durée et un fonds copiant l’indice actions S&P500 (500 premières capitalisations américaines) ont rapporté exactement la même chose, à savoir 225%. Ce qui revient à 6,1% par an. Or, sur cette même période, les obligations, conformément à leur comportement historique, se sont avérées bien moins volatiles (risquées) que les actions (volatilité de 10,6% pour les obligations versus 16,3% pour les actions).

Voilà donc un exemple significatif (car sur 20 ans) qui vient contrecarrer l’existence de cette fameuse relation positive entre le risque et le rendement. Moins risquées que les actions, les obligations ont rapporté la même chose.

Est-ce une anomalie ? Oui, certainement. Car, historiquement toujours, les actions “battent” régulièrement les obligations. Comment dès lors expliquer ce graphique ? Il y a peut-être à creuser du côté de l’assouplissement quantitatif décidé par la Réserve Fédérale (Banque Centrale US), à la suite de la crise financière de 2008, qui aurait provoqué une bulle obligataire. A l’été 2017, Alan Greenspan, un ancien président de la Fed, avait mis en garde contre une telle bulle, arguant du fait que les taux d’intérêt à long terme étaient anormalement bas et ne pouvaient dès lors que remonter. ce qui entraînerait une baisse de notre fond obligataire.

Cela reste aujourd’hui un scénario vraisemblable alors que les taux d’intérêt à court terme, quoique toujours bas, sont orientés à la hausse.

Lorsqu’il s’agit des grandes classes d’actifs financiers (actions, obligations, cash), ne remettons donc pas en cause définitivement la relation risque/rendement : les actions, plus risquées, sont toujours censées rapporter plus que les obligations qui, elles-mêmes, rapportent plus qu’un fonds monétaire.

L’orthodoxie de la finance académique sort donc grande gagnante ?